mardi 2 février 2016

Clémence - Un petit rien

Pour une pépite.

Cécila terminait dans un souffle cet air sublime de la Clémence de Titus de Gluck : « Se mai senti spirarti sul volto... »


Cette aria déclencha en moi le besoin quasi vital de retrouver mon petit carnet vénitien. Celui à la serrure minuscule, où je notais mes airs préférés. 


- J'en ai pour une minute, juste un petit rien ! m'écriais-je en montant l'escalier, abandonnant mon premier café du matin et mon mari à peine sorti des brumes matinales. 


Je me réjouissais d'avance de mes retrouvailles musicales en tendant la main vers l'étagère adéquate.

Une tête de vis fit de l’œil à la manche de mon cardigan et l'attira méchamment au point de lui tirer un fil. Je posai délicatement mon carnet vénitien sur ma table et descendis à la recherche d'un tourne-vis et d'un crochet. L'un pour un tour de vis, l'autre pour un tour de maille. 


J'entrai dans le cellier où dormait la petit boîte à outils. Je constatai, primo, que le panier de linge sale débordait avec opulence et que , secundo, j'avais oublié de vider la machine. J'oubliai un instant ma quête.

J'ouvris le hublot et reçus dix litres d'eau sur les pieds. Je partis à la recherche d'un seau et d'une serpillière pour éponger le sol. Je nettoyai le filtre avec application et relançai le programme. 


Munie du tourne-vis, je partis à la recherche d'un crochet dans mon panier à ouvrages. Le saisissant trop vivement, il se vengea en me plantant traîtreusement une écharde dans le pouce. J'avais besoin d 'une loupe.

La petite loupe de bijoutier. Ah….dans le tiroir de l'entrée. 


Mon mari me pria de cesser mes déplacements incongrus qui lui donnaient le tournis. Je m'assis au coin de banc, et lui accordai le temps de boire mon café. Ce fut surtout mon pull qui absorba le breuvage tiède.


- M'attends pas, finis de déjeuner sans moi lui criai-je du fond du couloir en constatant les dégradés de bruns.

Je filai sous la douche. Et, tant qu'à faire, un shampoing-brushing et un léger maquillage feraient également grand bien à mon moral. Quittant la salle de bain, j'eus simultanément une pensée pour la maille de mon pull et pour la mercerie-pressing. 


Je revins à la cuisine, empoignai mon sac-à-main et les clés de ma voiture, lançait un baiser du bout des doigts et partis vers la bourgade voisine. 


A peine arrivée sur le Cours, je rencontrai mon professeur de poterie qui se réjouissait de me voir car il désirait changer la date de son prochain cours.

- Ok, ciao, ciao, j'attends ton mail !

C'est alors qu'apparut dans mon champ de vision une copine de l'atelier écriture.

- Ah, je parlais de toi il y a à peine un quart d'heure…

- Et….

Et c'est parti. De l'atelier écriture à l'atelier poterie, nous en vînmes au nouveau petit resto sympa qui venait d'ouvrir et que nous pourrions tester. 


Échange de textos qui se conclut par un « Chacun dans son truc ».

Le pressing était encore fermé. Nous décidâmes de siroter un autre café ailleurs. En lézardant grâce aux ingrédients indispensables : fauteuil, soleil, ciel bleu et terrasse. 


Enfin, la mercière ouvrit ses portes. Elle accueillit mon pull en cachemire avec délitasse et j'en profitai pour m'inscrire à son atelier tricot.

Pensant à rejoindre mes pénates, j'en profitai pour passer au super-marché. Le plein pour le frigidaire et le plein pour la voiture. 


Le soleil commençait à donner quelques signes de faiblesse au moment où je pris le chemin de la maison. Je sortis les paniers du coffre et constatai avec effroi que Mistral avait déposé un paquet de feuilles sur la terrasse. J'empoignai le balai…et fis un plein de feuilles ! Je relevai un pot de fleurs qui s'était renversé. 


- C'est moi… Tu ne devineras jamais…..

- Si….. 


Le soir tombait et moi, je tombais aussi, d'une fatigue béate. 


- A propos, ne cherchais-tu pas quelques pépites musicales ?

- Mince alors….


Je grimpai à nouveau les escaliers et m'emparai de mon carnet. Je regardai le petit cadenas doré.

- La clé ?! 


Je redescendis et glissai un CD : « Cécilia chante Gluck »

8 commentaires:

  1. Wow ! Je suis sur les genoux aussi àprès cette épopée à cent à l'heure ! Bravo. ;-)

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  2. Elle n'est pas sortie du cercle vicieux gluckien !

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  3. Désolée, Fred, il y a des fois où je frappe plus vite que mon ombre...

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    1. Hahaha moi qui me faisais à l'idée d'une aventure !

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  4. c'est ce qui s'appelle une journée bien occupée ! et une femme qui a plus d'un objet d'intérêt :)

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