Lorsque
Arthur souffla ses dix bougies, il déclama : je serai écrivain.
Au
fil du temps, d'autres priorités s'étaient octroyé la première place et il
oublia de se demander « Quand serais-je écrivain ? »
Ce
jour arriva avec un remerciement accompagné de belles indemnités.
La
surprise retombée, Arthur réalisa que le temps d'écrire était arrivé. Il se
prépara un environnement de choix : un petit bureau, un fauteuil confortable,
une lampe, un ordinateur, une imprimante, une rame de papier, un cahier, des
crayons, des gommes, des stylos de toutes les couleurs. Parfait.
Le
premier jour, il s'assit, posa les coudes sur la table et cala son menton entre
les paumes. Il regarda autour de lui. Il réfléchissait.
«
Que vais-je pouvoir écrire ? Pourquoi ? Pour qui ?»
Il se
dit que la nuit lui serait de bonne compagnie. Il éteignit la lumière et alla
se coucher.
Le
deuxième jour, il se rendit dans une agence de voyage.
Le
troisième jour, il débarqua à l'aéroport Sir Gaëtan Duval à Plaine Corail, en
plein milieu de l'Océan Indien. Rodrigues.
Le
quatrième jour, il chercha l'inspiration en flânant dans les rues de Piments
Baie Topaze. Il s'installa sous une
varangue et attendit que le soir tombe.
Le
cinquième jour, il commença à s'inquiéter. L'inspiration lui faisait toujours
défaut. Et pourtant, il s'installa à nouveau sous la varangue et attendit en
prêtant attention aux conversations. Ce jour là , on parlait d'une petite
île voisine et du triste sort de ses habitants.
Le
sixième jour, Arthur revint sous la même varangue et engagea la conversation.
Enfin, il le tenait, son roman ! Il s'inspirerait de « la »
légende.
« Un
compositeur en mal d'inspiration s'était réfugié sur cet îlot minuscule. Les
habitants lui apportaient chaque jour, les plus beaux fruits, les plus belles
fleurs afin qu'il retrouve le sourire et l'inspiration. Mais chaque jour
aggravait son ingratitude et sa hargne. Un matin, il retrouva le sourire. Il
demanda aux habitants de l'aider en lui offrant une part d'eux-mêmes.
Naïvement, ils acquiescèrent, trop
heureux de voir le compositeur se dérider. Le lendemain, une malédiction frappa
tous les habitants, jeunes et vieux, atteints par des maladies orphelines. Le
compositeur composait avec frénésie.
De
retour au pays, son opéra fut un succès. Jamais il n'eut la moindre reconnaissance
pour les Îliens. Quelques jours plus tard, il apprit par son médecin qu'il
souffrait d'une maladie orpheline et mourut dans l'année. »
Le
septième jour, Arthur composa la trame de son roman et écrivit sans relâche.
Rêve et réalité s'entrecroisaient, de même que les joies et les malheurs. Son
roman se voulait optimiste, mais il ne
pouvait taire les souffrances. Chaque
matin, les habitants lui apportaient fruits et fleurs. Chaque soir, il les
remerciait en en leur faisant la lecture
des pages écrites.
Le
temps passa. Arthur dut rentrer au pays. Il promit ne jamais
oublier ni les Rodriguais ni les Iliens. Son roman fut un succès. Il
créa une Fondation dont l'objet est l'étude des maladies orphelines.
Le
jour même, à plus de dix mille kilomètres, perdus au milieu de l’Océan Indien,
des Iliens constatèrent que leurs maux disparaissaient...
Très joli conte ! Le pouvoir de l'écriture est considérable.
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