Les
failles
Au
jardin asséché, je livre une bataille.
Au
grand air retrouvé, le défi est de taille !
Arroser
et bêcher, au plus frofond des failles,
Sans
grands soins prodigués, la terre souffre, s'entaille...
Salement
fagotée, même les oiseaux tressaillent,
Quand
j'avance, déroutés, ils s'envolent et piaillent ;
Sur
le prunier, perchés, ils surveillent mon travail,
Curieux
et amusés, échappés du bercail.
Mes
amis, mes alliés, quand la douleur tenaille,
Vous
me réconfortez, éloignez la grisaille,
De
mon coeur torturé, entouré de murailles
Censées
me protéger...Légères, comme la paille...
Je
trace des carrés, repousse la broussaille
Du
futur potager, à grands coups de scisaille.
Bientôt
je sèmerai, des épinards, de l'ail
Et
aussi des navets...Je m'étire, je baille.
Tout
créer, redessiner, reposer les rails
Pour
de nouveaux projets... Passez sous le portail
De
mes joies mesurées. Le ciel, comme un vitrail
Entre
les branches éffeuillées, nous offre un chandail
De
jaunes et d'orangers...Des contours, je retaille
Les
ronces indésirées, et oui, je m'encanaille... !
La
forme espérée, du porche aux entrails,
De
mon jardin rêvé, n'admet pas la pagaille.
Et
pourtant la beauté, tel un épouventail
Pourrait
bien se dresser, dans une allée de rocaille,
Et
cela, je le sais, je l'attends comme la caille
Patiente,
réfugiée, esquivant la mitraille
Des
cailloux sous les pieds, des chasseurs qui ripaillent.
Dans
mon monde ordonné, où je compte les mailles
D'un
destin édifié d'illusions que j'empaille
D'un
amas de regrets, peut-être des détails...
Les
plaisirs sont pesés, et donnés au bétail
De
petites bouchées, les estomacs rouscaillent
Impatients,
affamés...Mais quand est-ce qu'on ripaille ?
Vois,
la table est dressée, je t'attends, "le détail"
Qui
viendra bousculer mes projets, éventails,
de
mes rêves étriqués ! Entend, ma folie braille !
Mais
mes peurs amplifiées, annoncent les funérailles
D'un
départ périlleux, d'un changement de rail...