vendredi 30 septembre 2016

Marité - Au pied de la lettre

Querelle de clocher

Roger - Tiens, voilà notre ami Jeannot. Salut Jeannot. Tu arrives à point nommé. On vient de décider avec Gérard de prendre la tangente aujourd'hui et de s'en payer une tranche...

Jeannot - Salut vous deux. Et pour un peu, c'était sans moi hein ? Comme d'habitude. Je dois compter pour du beurre, moi. Ou alors je sens le gazoil.

Roger - Oh, minute papillon. Tu t'emballes, tu t'emballes, soupe au lait ! Et toujours pressé comme un lavement. On ne t'a encore rien dit et voilà que déjà, tu ramènes ta fraise et monte sur tes grands chevaux.

Jeannot - Je vous connais les gars. Bonnet blanc et blanc bonnet. Toujours prêts à me mettre au rancart.

Roger - Et ben, on n'est pas sortis de l'auberge. T'as toujours un pet de travers Jeannot. C'est vrai quoi. Tu commences à nous courir sur le haricot. Et j'appelle un chat, un chat.

Jeannot - Chat échaudé craint l'eau froide, les amis !

Gérard - Bon, alors ? J'en ai marre de peigner la girafe. Il fait un froid de canard sur cette place. Ecoute Jeannot, tu nous fais braire avec ton caractère de cochon. Si on t'envoyait paître chaque fois que tu nous poses un lapin toi...C'est pas toujours toi le dindon de la farce il me semble.

Jeannot - La bave du crapaud n'atteint pas la blanche colombe.

Roger - Ça suffit à la fin. Z'en avez pas assez de vous comporter comme des gosses ? Revenons à nos moutons.

Jeannot - Et vous aviez décidé quoi, au fait ?

Gérard - D'aller aux filles pardi !

Jeannot - Peuh ! Juste pour faire le joli cœur alors ou pour te rincer l'œil, Gérard parce que...

Gérard - Tu peux parler toi qui n'as jamais trouvé chaussure à ton pied.

Jeannot - Peut être. Mais au moins, je n'ai pas besoin de surveiller ma femme si elle a tendance à avoir la cuisse hospitalière...

Roger - Et voilà ! Ça recommence. Jeannot, tu pousses le bouchon un peu loin. A propos de bouchon, on va à la pêche. Tu veux venir ?

Jeannot (vexé) - Peu me chaut. Je vous tire ma révérence. Bon vent !

Gérard et Roger - Sans rancune Jeannot ! Et à ce soir pour s'en jeter un derrière la cravate.

mercredi 28 septembre 2016

Emma - Au pied de la lettre

Le roi de la toundra.

Dix jours que Boris et Sacha battaient la campagne et défonçaient la steppe à coups de serpe et de pioche ; déjà la remorque était bien chargée, principalement de défenses de mammouth que rendait le permafrost, dont la boue dégelée léchait leurs bottes.

Et là, круто*! Une tombe ! Génial ! Les ancêtres ont toujours adoré se couvrir de bijoux pour le grand voyage.

Le recéleur d'Irkoutsk allait se frotter les mains !
Le coffre disjoint était planté verticalement, ils devaient dormir debout il y a 2000 ans !

Il y avait un grand plat en métal oxydé sur lequel on avait dû, semble-t-il, poser un lapin, ou un chat, comme provision ou compagnon de route ; et apparemment, en glissant, l'ancien avait mis les pieds dans le plat ! Du moins il avait un pied dans la tombe et l'autre à un mètre de là ; le bas des côtes s'était effondré en accordéon, l'estomac était dans les talons de ce qui avait dû être des chausses en fourrure, à en juger par les gros tas d'arêtes à cet endroit. Une sorte de poignard noirci était fiché dans le bois en travers, et Boris dut passer l'arme à gauche pour dégager le reste.

Le crâne était bizarre, orbites énormes, les yeux plus grands que le ventre, encore qu'il était assez difficile de situer le ventre. Une seule dent dans la mâchoire, mais il avait la dent dure, le bougre !

- Hourra** ! il a un cœur d'or ! s'exclama Sacha, et au même moment, sa lampe frontale s'éteignit.
- Allume la bougie, dit son comparse, on va devoir dégager fissa, la route est longue.

Alors que Boris tenait la chandelle devant le briquet de Sacha, la poche de méthane qui tenait compagnie à la momie depuis des millénaires s'enflamma.

Et c'est comme ça que deux filous s'envoyèrent en l'air avec un roi de la toundra.

(* krouta ** hourra)

Où lire Emma

Vegas sur sarthe - Au pied de la lettre

Du fil à remordre
Non content de m'être levé du pied gauche, ce foutu matin y'avait un brouillard à couper au couteau, mais j'avais paumé mon Opinel la veille dans un mauvais concours de circonstance; autant dire que j'y voyais goutte.
Je marchais à pas comptés en direction du frigo – j'me doutais bien que le brouillard venait d'là – mais allez compter vos pas quand y faut enjamber des cadavres, Monsieur le Juge.
Y'en avait douze – pas des cadavres mais des pas – entre le lit et le frigo, je le sais passeque je fais que ça depuis que Germaine est plus là.

Germaine c'était la seule nana assez étroite d'esprit et assez large d'épaules pour m'empêcher d'aller au frigo, Monsieur le Juge... c'est ça que je kiffais pas chez elle.
Passez moi l'expression mais elle m'en a donné du fil à remordre, Monsieur le Ju... Comment ça, étranglée?
Germaine a été étranglée?
Bref, au dixième pas j'ai du marcher sur un magnum – pas une arme Monsieur le Juge mais un cadavre de grosse bouteille – et j'ai atterri dans le frigo... ça pouvait être que le frigo parce qu'y a pas d'autre endroit éclairé dans cette turne pour piquer une tête dans un plat de choucroute.

La choucroute, j'peux vous jurer Monsieur le Juge que c'est meilleur réchauffé que froid et à jeun.
C'est vrai vous m'avez pas encore demandé de jurer.
Ensuite j'ai refermé la porte du frigo à cause que je tenais déjà un rhum carabiné.
J'ai dit rhum? Euh ça m'étonnerait, j'ai dit rhume et pis c'est vous qui parlez de carabine.
Comment ça, MA carabine?
Le concubin de Germaine a été tué chez moi de trois coups de carabine?
Y pouvait pas aller mourir ailleurs çui-là, ce SDF avec un nom à coucher dehors, ce tireur au flanc toujours là à brailler aux corbeilles?
Vous dites... qu'une faute avouée est à moitié relaxée?
Euh... j'vais peut-être me remettre à table, alors...

lundi 26 septembre 2016

Laura Vanel-Coytte - Au pied de la lettre


Au pied de la  dernière lettre que je t’ai écrite, j’ai mis un post-scriptum ;
Pardonne  mon audace dans les mots mais j’étais vraiment en plein delirium
Tremens est mon excuse mais il ne faut pas me prendre au pied de la terre
Mes mots dits, après ma soirée au Club des Haschischins avec Baudelaire.

Lorsqu’il me parlait de sciences occultes, j’ai bien des fois donné ma langue
A la sauce épicée au chat qui, en humant l’air opiacé, se frottait à nos jambes.
J’ai aussi fait goûté ma langue sucrée et croquante à la maîtresse de mon hôte,
Jeanne Duval, une chatte noire qui pouvait porter malheur à son homme.

Ce n’est pas que mon guide  en opium ait vraiment un cœur d’or, il était plutôt fou :
Une  boue qu’il tentait dans son athanor d’alchimiste de changer en  un or, saoul
Qu’il était grâce à la fée verte : cette absinthe lui faisait voir dans le brouillard
Nerval pendu, rue de la lanterne alors qu’il arrivait seulement  avec son homard

Avec son compagnon à pattes, Nerval battait la campagne du Valois en chantant
De vieilles comptines entendues dans la bouche d’or des filles en fleur d’orient
Ses soirées parisiennes lui coûtaient les yeux de la tête, une tête par ailleurs fragile :
Ses  mêmes lui sortaient parfois de la tête alors que Baudelaire avait liquidé son héritage.

Au pied de la  dernière lettre que je t’ai écrite, j’ai mis un post- scriptum  pour te conseiller
De faire les quatre cent coups en regardant le film de FrançoisTruffaut, mon cinéaste préféré
Je sais que tu préfères les histoires à dormir debout style « Twiligt » ou Harry Potter
Mais j’arriverais un jour à te faire lire Nerval, Goethe, Hölderlin et Baudelaire.

Où lire Laura

Jacou - Au pied de la lettre

Prendre la clé des champs

Bernard attendait impatiemment Catherine.
Il avait besoin d'elle. Un besoin impérieux, grandissant et inconfortable.
" Qu'est-ce qu'elle fait? " gémissait-il, le nez au ras des herbes folles." J'en peux plus! Catherine!" appelait-il.
Oui, je suis là.
Mais où, là? Je ne te vois pas. Tu l'as trouvée?
Non, y'en avait plus.
C'est impossible! J'en ai envie! Tu ne peux pas savoir.
Moi aussi.
Les voilà, tous deux, couchés dans les hautes herbes, désespérés. Catherine rampe vers Bernard. Devant eux, un vaste champ.
Regarde! dit triomphante Catherine.
Quoi?
Là! Le champ! Y'en a plein!
Plein de quoi?
De l'herbe!
Et alors, nous voilà bien avancés! T'as vu la hauteur de la clôture?
Réfléchissons. Doit y'avoir moyen d'y entrer dans ce pré.
Moi, j'en peux plus. Toi, réfléchis, si tu as encore la force. Mais fais vite! Ça me manque trop.
Y'a un portail!
Haletant, ils  avancent vers le portail, trainant leurs corps du plus vite qu'ils peuvent. Atteignent enfin le portail, qui ne s'ouvre pas. Au comble du désespoir, ils s'affalent devant cette ouverture condamnée. Le bonheur est à portée de main, mais comment faire pour l'atteindre!
Je sais! jubile Catherine. Attends-moi. Je reviens tout de suite.
Fais vite. J'en ai trop besoin.
Moi, aussi.
Elle revient, un instant plus tard, triomphante.
Je l'ai!
Quoi?
Et levant bien haut sa main, dans laquelle brille un objet, Catherine répond, tout sourire: "Le sésame!"
Du sésame! C'est tout ce que tu as trouvé!
Suis-moi!
Ouvrant le portail, suivie d'un Bernard ragaillardi, Catherine pénètre dans ce champ. Tous deux s'y roulent exaltés, écrasant cette herbe si longtemps désirée, humant cette suavité odorante, cette herbe, ah ! cette herbe! Retrouvant un instant de lucidité, Bernard demande:
Comment t'as ouvert?
Avec le sésame, je te l'ai déjà dit! C'est bon d'être ici. Je plane!
Te moque pas de moi.
Je suis retournée à la ferme. Derrière la porte, accrochée à un clou, la clé des champs. Je l'ai prise. Allez, viens planer avec moi.

Semaine du 26 septembre au 2 octobre 2016 - Au pied de la lettre

Pendant que vous appreniez à manier le boutoué tubulaire ou pas,  un drame se déroulait. Mais quel drame terrible a bien pu pousser celui qui a "réellement" donné sa langue au chat ? A partir d'une expression choisie dans le poème de Claude Roy, inventez une histoire en prenant littéralement une  ou plusieurs de ces expressions  au pied de la lettre :
Avoir un cœur d'or,
Battre la campagne,
Coûter les yeux de la tête,
Faire les quatre cents coups,
A dormir debout,

Cette liste n'est bien sûr pas exhaustive. 
Vous avez jusqu’à dimanche 2 octobre minuit pour prendre les expressions au pied de la lettre et nous envoyer votre texte à l'adresse habituelle : impromptuslitteraires[at]gmail.com
après, elles reprendront leur forme....

dimanche 25 septembre 2016

Mabata - Traîtres mots


Louis habitait Aigues-Mortes depuis toujours, comme son père et son grand-père avant lui, et comme d'ailleurs tous ses aïeux qui devaient bien remonter jusqu'à Saint Louis... Il vivait au cœur de la vieille ville non loin de la porte des Moulins. Il lui était ainsi facile de rejoindre les "salins" où il avait été embauché comme paludier. C'est Augustin, le paternel, qui, selon la tradition, lui avait appris à manier le boutoué pour récolter le sel. Louis aurait pu être heureux de cette vie qu'il avait choisie. Mais là où le bât blessât fut la naissance de son petit frère Paul. Il en fut si perturbé qu'il se mit à bégayer. C'est la jalousie disait Augustin. Mais non répliquait sa femme. Il ne peut pas être jaloux, il sait bien que l'amour est expansible ! Pourtant les enfants grandirent côte à côte, usant ensemble leurs chaussures sur les remparts de la ville. Louis, donc, entra aux salins. Paul quant à lui avait pris goût aux études. Il était devenu ingénieur et passait sa vie à construire des ponts tubulaires à travers le monde. Quand il revenait au pays, il étalait de grandes théories pour "réoccitaniser" la région, disait-il, lui redonner sa splendeur du temps des troubadours. Il en arborait d'ailleurs fièrement le drapeau à l'arrière de sa voiture. Il n'hésitait pas à ponctionner des anecdotes locales pour émailler ses démonstrations. Ce qui était paradoxal, c'est que, plus jeune, il avait haï toute la communauté et ses coutumes... Dès que Paul commençait ses discours, Louis dérangé par la véhémence de ce frère si peu présent, sortait de la ville et se rendait au potager qu'il aimait cultiver un peu plus loin. Il se prenait à motoculter pendant des heures. Tout le terrain y passait et sa colère s'envolait, il en revenait apaisé. Après tout, Paul était son frère. Il n'en avait qu'un, et mis à part ses folies occitanes il était attentionné et aimant avec les parents, ce que Louis appréciait particulièrement. Alors il rentrait, donnait l'accolade à son frère et lui disait : on se le boit ce pastis ?

vendredi 23 septembre 2016

Arthur Hidden - Traîtres mots

  • Alors?
  • Quand je suis allée chez le notaire je ne me doutais vraiment pas de ce qui allait nous arriver.
  • Tu es énervante. Ne tourne pas autour du pot. Dis!
  • Tu es paradoxal tu sais. Hier encore tu m'a fait une scène parce que tu trouvais que je ne te racontais pas tout les détails de ma journée. Ta maudite jalousie! Oh comme je t'ai haï!
  • Oh Clara! Je t'en prie, excuse moi mais tu me fais griller d'impatience. Ma patience n'est pas expansible à l'infini. Tu le sais bien, alors arrête de me persécuter. Qu'a dit le notaire?
  • Tu sais, je l'aimais bien mon grand oncle si ça faisait des années à cause de toi que je ne l'avais pas revu.
  • Clara, je t'en prie. On dirait que je te tenais enfermée!
  • Avec grand-père je me souviens d'une fois où on était aller le voir en vacances. On avait pris le bateau. Il n'y avait pas encore de pont pour desservir l'île.
  • Clara!
  • Je devais avoir huit ans. Tu te rends compte d'une aventure ... Je t'assure que ça ne sert à rien de tapoter la table, de soupirer, de te frotter le menton. Pour une fois où j'ai quelque chose à raconter ... Sois patient mon chéri, sois patient.
  • Clara ...
  • Quand il avait fini sa journée au marais salant l'oncle rentrait pour motoculter son champ au bord de mer.
  • Oh Clara, qu'est-ce que le notaire a dit?
  • Tu sais l'oncle vivait très difficilement. Il nous laisse un lit, une table, une chaise, deux casseroles et ... et un vieux relax en acier tubulaire.
  • Un vieux relax en acier tubulaire! C'est tout?
  • Ah oui, j'allais oublier.
  • Tu allais oublier quoi?
  • Il nous laisse aussi la bicoque et le terrain.
  • Bon dieu Clara! Tu aurais pu le dire plus tôt! Ça fait combien d'après le notaire?
  • Il estime à plus d'un million.
  • Un, un, un
  • C'est bien la première fois que je te vois bégayer. En fait bien sûr on va se faire ponctionner mais le notaire dit qu'il nous restera de l'ordre de un million trois ... Eh bien, tu ne dis rien?
  • Tu te rends compte ma chérie. On va pouvoir larguer cet appartement pourri en région parisienne dont le loyer me coûte la peau des fesses.
  • J'en paye ma part!
  • A la hauteur de tes revenus! Mais ce n'est pas le sujet. Ne m'interromps pas tout le temps, c'est vrai, c'est énervant! Je voulais dire qu'on va pouvoir se réoccitaniser en rachetant la maison de mes parents.
  • Se réoccitaniser? La maison de tes parents? J'ai oublié de te dire que la seule chose que l'oncle ne nous laisse pas c'est son boutoué qui appartenait déjà à son grand-père.
  • C'est quoi un boutoué?
  • Le notaire m'a expliqué que c'est un outil dans les marais salants. Il en fait don au Musée municipal. Son conservateur était là chez le notaire et il était tout content. Il a dit que c'était la première fois qu'il en voyait un qui était si ancien.
  • Ah la charogne! Il aurait pu nous le laisser et on l'aurait vendu à un antiquaire ou au musée.
  • C'est bien là que le bât blesse avec toi mon chéri. Je vais te laisser te débrouiller tout seul avec le loyer de l'appartement. Ma part était si minime! Et je vais me chercher une petite maison en Bretagne.
  • Mais Clara!
  • Il n'y a plus de Clara pour toi. J'ai pris mon billet de train pour Rennes ce soir. Je vais chez ma sœur le temps que je trouve une maison. Maintenant tu me laisses faire mes valises et tu restes calme où j'appelle la police.

Chri - Traîtres mots

Le sel des mots.


__ Imbécile !
__ Dis donc, petit animal c’est à moi que tu parles comme ça ? Sais tu qui je suis ? C’est bien à moi que tu dis imbécile ? Le paradoxal ne t’effraie pas, toi ! Avec ta tête d’âne sous le bât, tu oses ? Pourrais-tu le redire sans bégayer, imbécile ?
__ Imbécile !
__ Non mais vous entendez vous autres ?
Il va voir ce qu’il va voir, je m’en vais lui motoculter les neurones de l’affectif,  je vais de ce pas lui ponctionner la machine à câlins et lui réoccitaniser l’armoire à douceurs à ce petit énergumène. Tu fais tout pour être haï, toi.
Allez, au lieu de dire des mauvaisetés que tu ne penses pas, attrape ton boutoué et viens-t-en bosser, les tas de sel se font pas avec des mots, et fais gaffe, le tubulaire en culottes courtes, contrairement à ton insolence, ma patience n’est pas expansible.

jeudi 22 septembre 2016

Lilousoleil - Traîtres mots

« Quand les andouilles voleront tu seras chef d’escadrilles » quand ils auront des éperons tu seras chef d’escadron » 
 chantait à tue-tête Fransounet, grand seigneur de la Dombes tandis qu’il motocultait son tabagnon1, de  terre sablonneuse suffisamment riche pour faire pousser des asperges, des carottes et des pommes de terres qu’il vendait généreusement sur le marché du samedi à Châtillon. Son petit commerce fonctionnait bien, lui apportait un petit plus à sa retraite. Fait paradoxal, triturer et petafiner son lopin lui avait procuré un cettain  bien être :  plus mal au dos,  pffuit envolées les douleurs et comme il économisait les Dolipranes, c’était tout bénéfice ; pas de petits profit.  
Il venait d’arrêter sa machine infernale quand il vit arriver son voisin. Longtemps, il avait haï cet homme et c’est là que le bât blesse :  ni l’un ni l’autre ne savait pourquoi. Alors ils avaient, d’un commun accord, décidé de faire ami –ami. L’autre, essoufflé et se mit à bégayer des borborygmes inaudibles. Fransounet fit asseoir le Dédé, lui offrit un petit canon de rouge et c’est les miches  dans la brouette que le pauvre raconta son histoire.
Vétuste du Poitou avait déjà conquit toute la région de Grenoble  et il était le maître de toutes les régions allant du Poitou à Toulouse. Il voulait maintenant réoccitaniser la Dombes et le Lyonnais.
- Dis il est en métal expansible ce Vétuste ! Y a pas compris qu’ici, c’est chez nous, la terre du Beaujolais et de la volaille de Bresse.  Y va quand même  pas confondre le Côte du Rhône et notre nectar, les oies à gaver et nos chapons raffinés.
- N’aies crainte, arrivera pas à ses fins notre artignole2, on va lui coller la Marinette dans les pattes ;  avec son boutoué tubulaire, elle y fera le coup du Derviche tourneur, y verra que du feu !
Allez un p’tit coup de chopine  pour la route mon Dédé !  

Mots du patois lyonnais
1 - Tabagnon : coin, lopin de terre.
2 - Artignole : vaurien 

Pascal - Traîtres mots


Le goût de ses lèvres 

En formation dans mon Service, je l’avais prise sous mon aile ; inconscient, c’est moi-même qui avais réclamé à mon chef une présence féminine dans nos murs, pour humaniser un peu notre travail devant les ordinateurs. Toute pimpante, quand elle a débarqué dans mon bureau, je ne savais pas à quel point elle allait bousculer ma vie. Comme une maladie sans remède et malgré l’insupportable différence d’âge, je suis tout de suite tombé amoureux d’elle… 

Naturellement, pendant cet apprentissage, elle s’était rapprochée de moi comme une fille peut faire confiance à son père ; nous avions des connivences, des plans secrets, des retrouvailles autour d’un café, en dehors des moments de pause ; on cassait le sucre en deux et on partageait la même cuillère. Elle me racontait ses week-ends, me montrait ses photos de vacances à Guérande, m’expliquait le maniement du boutoué et, moi, j’écoutais ses gazouillis de jouvencelle. Ses pépiements étaient une douce musique rassérénante, un orchestre réjouissant et même si je n’écoutais pas tout, j’étais subjugué par la mélodie de ses trémolos enthousiastes… 

Entre nos deux bises du matin, je respirais intensément les effluves de son aura ; j’étais alors un capitaine de vaisseau aux impressions sidérales ; je flottais dans son monde, entre le velouté de sa peau, le parfum de sa chair, le duvet de ses joues. Les quelques grains de beauté sur son visage, c’était ma carte au trésor. Ses yeux si bleus, son sourire si blanc, ses cheveux si blonds, c’était mon or. Elle était une admirable planète aux confins de mes songes les plus inespérés. Je gravitais autour, j’estimais mes chances de cosmonaute, je révisais mes plans d’alunissage… 

Je crois qu’elle n’était pas dupe ; elle savait jouer de toute la panoplie de ses charmes de jeune femme, en appuyant ses sourires, en me regardant intensément, en lançant des allusions subjectives qui chaviraient mes sens tant je les traduisais avec émotion. Alors, immanquablement, je tombais dans ses yeux ; l’astre éblouissant de ses pupilles m’autorisait des baignades extraordinaires, je plongeais dans ce maelstrom bleuté et les papillotements de ses cils étaient des zéphyrs qui s’harmonisaient avec mes armées de soupirs… 

C’était un Amour paradoxal. Je voulais toucher mes ambitions, boire au Calice, croire au Ciel, en sa magie, une dernière fois. Nonobstant son statut de femme mariée, je voulais la conquérir, la prendre dans mes filets, ponctionner sa belle jeunesse, qu’elle tombe innocemment amoureuse de moi, de mon charme, de mon parfum, de mes cinquante ans, de ma voiture, et que sais-je encore ! Pourtant, j’avais peur de comparer mes rêves avec sa réalité ; j’avais peur d’être déçu et de tomber dans l’anonymat des gens qui n’aimeront plus ; j’avais peur de m’être trop découvert et d’avoir trop mis mon âme et mon cœur à nu devant l’égérie de mes plus beaux poèmes… 

Les jours de son absence, j’étais un chien sans maître ; j’étais un simulacre d’humain perdu dans ce monde sans essence. J’étais à moitié mort, j’étais un zombi errant dans les couloirs, une âme en peine au bât de l’ennui. Je n’avais plus goût à rien, les paysages étaient sans couleur, les parfums sans attrait, les émotions sans relief. Les conversations des autres m’ennuyaient, je les trouvais stupides avec leurs bons mots pitoyables et leurs conclusions irrévocables.

Tel un papillon de nuit, j’étais définitivement pris dans sa toile ; si je me débattais, c’était seulement pour mieux souffrir de dépendance. Quand je rentrais chez moi, le soir, j’avais des étincelles dans les yeux, des frissons dans le corps, et je triturais mon clavier pour lui déclamer des madrigaux énamourés que je ne lui envoyais jamais… 

Et puis, je m’en suis approché de trop près ; j’ai brûlé toutes mes chances contre cette étoile tellement brillante. Pourquoi ne suis-je pas resté à ma place d’amoureux transi ? Cette Ardeur platonique m’allait si bien ! Ce désespoir d’Amour remplissait mon encrier d’une expansible déification ! Moi, je ne demandais qu’à planer dans ses environs ; je voulais bronzer devant ses sourires, fermer les yeux devant ses soupirs, remplir nos silences avec plein de mots insensés comme des fleurs sauvages qu’on cueille par brassées d’allégresse !... 

Parfois, pendant sa formation, au jeu équivoque de la souris sur le tapis et des deux chaises tubulaires si rapprochées, nos mains s’effleuraient et j’étais un chat qui ronronnait ses caresses qui ne venaient jamais. Rougissants, on n’osait pas nous regarder mais l’écran entremetteur de l’ordinateur nous renvoyait notre image gênée… 

Pourtant, j’ai demandé plus ; je ne pouvais plus me satisfaire de cette boîte de pandore qui blanchissait mes nuits et noircissait d’aventures amoureuses mes cahiers intimes. Auprès de cette biche tellement séductrice, j’ai joué les audacieux dans une chasse à courre où j’étais le dernier des derniers ; mes appels de phare étaient lourds, déplacés, plus dérangeants que connivents. Alors, elle s’est refermée, elle s’est détournée, elle s’est éloignée. Elle m’a peut-être haï pour toute la confiance qu’elle avait placée en moi.

J’avais tué la poule aux œufs d’or ; celle qui enflammait ma passion et subjuguait ma raison. J’avais tout perdu : mon âme, ma conscience et ses sourires enjôleurs. Le mirage dans lequel je me complaisais s’était dissous à cause de mon imbécillité de vieux prince charmant à la manque. Désormais et à tout jamais, il me faudrait survivre avec cette solitude accaparante, tenter d’y peindre mes fantasmes, d’y embellir ces souvenirs, d’y bégayer des mots sertis de tendresse inaltérable à longueur de doux sonnets. Désabusé, meurtri, triste, inconsolable, je suis parti à la retraite, j’ai déménagé, j’ai voulu tout oublier et je suis allé me réoccitaniser dans le terroir de mon enfance… Aujourd’hui, j’apprends à « motoculter » mon bout de jardin, histoire d’enterrer le passé…

Parfois, à l’aube, elle vient encore butiner dans mes rêves d’ariégeois ; entre La Lèze poissonneuse de ses truites sauvages et la Dent d’Orlu, tellement incisive, elle s’installe, cette souveraine. Vérifiant son pouvoir, souriante et toujours sûre de son succès, elle se coiffe longuement dans la psyché de mes contemplations les plus adoratrices ; c’est un doux accablement, une brutale caresse, un affolement serein. Et, quand je veux la toucher, la serrer dans mes bras, l’embrasser, pour connaître enfin le goût de ses lèvres, elle disparaît en riant entre les volets… Quand je saurai reculer le petit jour, j’arriverai à l’apprivoiser…

mardi 20 septembre 2016

Marité - Traîtres mots

Vive le célibat !

Oh, moi j'aurais mieux fait de rester dans mes salines à manier la lousse ou le boutoué ! J'aurais pas dû lui écrire à la Corinne (Lemarchand). Quelle idée aussi de vouloir m'occitaniser dans ce trou du cul du monde de Limousin. Tout ça pour une femme. Et quelle femme ! J'ai tiré le gros lot.

Elle m'exploite sur sa petite exploitation. Je vous dis pas le nombre de châssis tubulaires qu'il m'a fallu monter pour protéger les semis de la dame. Et maintenant, je motoculte. Toute la sainte journée, je motoculte. Elle fait dans le bio la nana qui cherche un homme. Sûrement pas pour l'amour et la bagatelle d'ailleurs mais pour le boulot. Elle cherche des bras surtout. Et ben je le serai pas son homme. Elle commande, ça, elle sait faire. En plus, elle bégaye : "J-J-Jean, tu n'oublies pas pas de de p-p-p- planter les les choux. Les ca-ca-carottes demandent de de l'eau. Il faudra bi-bi biner les fèves." Et quoi encore ?

Elle se dit moderne et paradoxalement, elle fonctionne à l'ancienne. "J-J-Jean, va mettre les bâts sur l'âne avant que que que je parte au au marché." Il paraît qu'un âne, ça le fait mieux pour transporter les produits du terroir. Heureusement qu'elle n'a pas dix kilomètres à parcourir !

Bon. J'aimerais profiter un peu quand même le soir, malgré tout. Avoir quelque récompense. Au moins un merci et un sourire. Mais taratata, pas expansive pour un sou, la demoiselle. Le sentiment : connaît pas.

J'en ai marre de me faire ponctionner la sueur pour des prunes. Je vais finir par la haïr, c'est sûr. Vaut mieux que je me tire avant que les mains me démangent trop...

Et vive le célibat !

Laura Vanel-Coytte - Traîtres mots

Les Faux-Saulniers
(de Gérard de Nerval, 1850)

Contrairement à ce qu’on peut penser, cette œuvre de mon écrivain préféré n’a pas grand-chose à voir avec le boutoué et l’univers de la saliculture. Cela peut sembler paradoxal car « Saulnier » est bel et bien un synonyme de « paludier » c’est-à dire celui qui récolte le sel. Les faux-Saulniers sont des trafiquants de sel. Le personnage principal de cette œuvre est le Valois, paysage, d’ailleurs, où se situent de nombreuses œuvres de Gérard de Nerval. Si vous ne connaissez pas ce territoire, il faut aller le découvrir entre la Picardie et l’Ile de France actuelles. Comme il y a beaucoup de cours d’eaux petits et grands, le paysage est celui du « vert paradis des amours enfantines » de Charles Baudelaire [1] et de Nerval, mes deux auteurs fétiches.

C’était il y a « seulement » 166 ans, une époque qui a beaucoup inspiré notre époque contemporaine, le début même, par bien des aspects de ce qu’on appelle le moderne par Baudelaire notamment. Cependant, dans la campagne, on ne songeait pas encore à motoculter.
L’enquête que Nerval mène dans ce récit le mène de Paris à Senlis via Soissons et il faut imaginer d’une part que le poète ne prenait pas forcément le chemin le plus court et d’autre part, que les trajets se faisaient dans une voiture à cheval et c’est là que le bât blesse pour nous, obsédés de vitesse alors que l’objectif même de ces voyageurs était de prendre le temps de voir, écrire. Les « Touristes » loin d’être des acharnés du « tout compris » et du « low coast » faisaient au contraire « Le grand Tour » ; il n’était pas à la portée du premier venu tout de même.

Comme on avait découvert que l’eau était expansible, on avait pu inventer la machine à vapeur puis le chemin de fer mais le rythme du voyage était loin de celui d’aujourd’hui et dont beaucoup se plaignent pourtant.
Aucune alerte information secondaire sur un fait divers déjà passé de mode ne venait ponctionner le temps de celui qui mettait toute son énergie et sa pauvre bourse dans le voyage en Italie sur les pas de Stendhal ou en Orient comme Nerval.
Son ami Théophile Gautier, lorsqu’il est (sans doute) passé par le Sud-ouest pour son « Voyage en Espagne », ne pensait pas à réoccitaniser cette région qui devait être fière déjà de ses traditions et de sa langue.

On a souvent ranger -parce qu’on aime bien ranger dans des cases- Nerval parmi les auteurs mineurs, les « petits maîtres » disait-on avec dédain et sans bégayer. On devait d’ailleurs sûrement imaginer que Nerval bégayait ; cet être chétif et fou. N’a-t-il pas effectué plusieurs séjours chez le Docteur Blanche, là où il y a quelques années, j’ai vu un consulat ?

Nerval s’intéressait à beaucoup des choses qui l’entouraient (comme moi) et c’est sûrement pour ça qu’il a écrit des œuvres dans tant de domaines différents : théâtre, poésie, récit de voyage etc. Je ne sais pas s’il a eu le temps de s’intéresser à l’industrie et à la production en tubulaire. Il est mort si jeune, trop jeune. J’ai haï cette rue de la Lanterne où il se serait pendu.

[1] Moesta et errabunda dans Les Fleurs du Mal

Lorraine - Traîtres mots


Il est de ces moments où la tête, vidée de tout, n’est plus qu’un réceptacle d’émotions, d’idées saugrenues, de somnolence, d’imaginaire invasif, pour tout dire d’abandon.

Est-il paradoxal qu’en de tels instants surgissent, sans queue ni tête, des images ou des associations qui ponctionnent, semble-t-il, le peu de raisonnement qui nous reste ? Je connais régulièrement ce phénomène.

Je me vois, à l’aide d’un câble, motoculter un navire de plaisance boutoué de belle manière par une force herculéenne. Au fond de moi, j’en ai une vague conscience, je hais ce travail farfelu. Même si l’outil tubulaire que je manipule prestement m’aide un peu. Je préfèrerais réoccitaniser le sud de la France malgré mes piètres connaissances de la langue d’oc qui m’entraîneraient aussitôt dans un bégaiement éperdu. Je sais que nous possédons des millions de neurones pour venir à mon secours. Mais ils ne sont pas expansibles et c’est là que le bât blesse.

J’envoie ce texte aux Impromptus. Peut-être y comprendront-ils quelque chose ?

Celestine - Traîtres mots

Dans nos jeunes temps déraisonnables, il n’était pas rare que nous nous retrouvions toute une bande à danser le boutoué sur le pont d’un rafiot grinçant des entreponts,  agités de soubresauts, parmi les accents chauds des cuivres et les effluves des madapolams empestant le benjoin.
Ce soir-là, occis par le rhum, et la trogne réoccitanisée par le soleil tropical, affalé contre un bât de bisaine, j’aperçus une créature que mon œil torve n’avait point encore entrevue parmi cette faune interlope. Une créature dite de rêve, remplie de bas en haut de formes globulaires,  superbe, de la cuisse ferme à la chevelure léonine, en passant par une croupe paradoxale et callipyge à vous en faire bégayer du fessier. Mon corps exprima par une soudaine et intempestive perpendicularité le désir de la ponctionner sur le champ dans les coursives. Je lui sortis dard-dard mon tubulaire en velours expansible,  mais elle motoculta toute tentative de séduction en m’envoyant valser dans les cordages comme un vulgaire paquet de chiffons mous. J’étais tombé sur une tigresse qui pratiquait les arts martiaux. Et ce soir-là, j’ai haï ma mère qui ne m’avait initié qu’au jacquet et à la danse de salon.


A mon père, qui m’a appris à jamais l’humour, la gaudriole et le second degré.

lundi 19 septembre 2016

Kakushi Ken - Traitres mots

V’la qu’en mon temps on savait « motoculter » avec « lou cabal » de « bât »…
Riez pas « les gueux », aussi paradoxal que cela « pisse » paraître, ça marchait !
Même que « moun cabal » lachait son « tubulaire » dans la terre, et bèh la récolte devenait
« expansible » que je vous dit, « Bou Diou » !…
Certes c’était mieux d’utiliser « lou boutoué » que les mains pour le ramasser « l’estron » ; parce que parfois « ca pouirait » tellement que j’en « bégayais » de suffocation ! Je « haï » le « tubulaire » du «cabal » cause que ça colle grave les doigt, z’avez qu’à essayer avant de faire la gorge déployée !
Comment vous pigez pas ce que je cause ? « Tè », « réoccitanisez » le coin, « ponctionnez » les
« estrangers », y reste quoi ?
Des types comme moi qui savent « motoculter » à moindre frais des « tubulaires » pour « expandre » l’oseille…
Tu te moques le vilain ?
« Bai caga à la bigno i raporta men la claou... »

Vegas sur sarthe - Traîtres mots

La Marie-Salope

Si je l'avais aimée aussitôt, je l'avais haïe aussi vite.
Ce qu'il y avait de paradoxal en Marie c'était d'être tellement vive d'esprit qu'elle en bégayait à vouloir tout dire sur tout.
Elle avait des idées sur tout et surtout des idées, elle en avait à revendre si tant est qu'elles aient valu le coup d'être monnayées.
Voilà t'y pas qu'elle s'était mis en tê...tête de ré...réoccitaniser le li...limousin, la pro...provence et l'auvergne?
Comme si ces régions avaient jamais été un jour occitanisées? Enfin, là n'est pas le problème.
Le problème vint quand elle voulut réoccitaniser le mot boutoué.
Chez elle le boutoué était un outil à man...manche tu...tubulaire ex...expansible destiné à ponctionner la va...vase dans les salines ou près des pon...ponts, mais chez moi on avait toujours appelé ça une Marie-Salope jusqu'à ce qu'on pense à mécaniser pour motoculter toute cette gadoue.
Que n'avais-je pas dit là?
J'eus droit à une conférence sur les Marie et une plaidoirie sur les salopes dont je vous fais grâce.
Quand le bât blesse il faut dételer alors j'ai dételé la corde qui m'enserrait le cou et me voilà.


Semaine du 19 septembre au 25 septembre 2016 - Traîtres mots

Après nous avoir fait partager vos paysages et vos états d'âme, saurez-vous imaginer un lien entre les dix mots suivants ?

boutoué, bât, bégayer, expansible, haï, motoculter, paradoxal, ponctionner, réoccitaniser, tubulaire


En prose ou en vers, bégayant ou paradoxal votre texte devra nous parvenir avant dimanche 25 septembre minuit à l'adresse habituelle :impromptuslitteraires[at]gmail.com

dimanche 18 septembre 2016

Stouf - Chaque paysage est un état d'âme 2

Chaque pays sage est en état d'alarme ...

Il fit ce qui est droit aux yeux de l'éternelle, mais avec un cœur qui n'était pas entièrement dévoué. On ne fait pas mourir les enfants pour les mères, on ne fait pas mourir les mères pour les enfants, amen ! La messe était dite et Zoria sortit tranquille de ce lac placentique où elle se sentait ici et maintenant à l'étroit. Une lumière vive inonda ses yeux et son âme et son instinct comprit qu'elle en possédait une,
sans vraiment comprendre le sens de ce mot ( même le jour de sa mort, lorsqu'elle fut très, très, très, vieille), elle le trouva plutôt beau mais ne l'employa jamais durant toute sa vie...

Tout de suite Zoria eut une place dans ce pays sage, il était beau, il sentait bon des tas de trucs qui sont dans le registre des admissions collectives et l'aloi y était cool.
Tout de suite des mains la touchèrent, la firent tourner et voler dans les airs, des lèvres mouillées furent collées sur son visage...des jeunes, rebondies et gaies, des vielles, flétries et légèrement nauséabondes. Zoria écouta son instinct et il lui dit que tout allait bien, c'était normale, mais elle se mit aux aguets, éveillée à l'afflux.

Pourtant elle aimait parler (sans un mot) à ce monsieur ange qui venait un peu remonter les draps le soir au moment de s'endormir, lui il la comprenait et elle pouvait tout lui dire des souvenirs de ses autres vies, elle avait confiance. Monsieur ange souriait tout le temps, il disait toujours oui et jamais mais, il lui faisait confiance. Il était là pour elle et semblait le gardien de toute son humanité à elle, c'était tranquille. Pourtant...un jour...ange posa son doigt sur la bouche de la petite fille et elle oublia tout...toutes les autres vies, les lieux de passage, comment faire pour...non, elle ne savait plus rien.
Booon ...qu'elle est cette odeur magnifique, des frites, je peux en avoir ?

La dame jolie qui s'appelait maman portait dans sa main un espèce de machin appelé biberon et Zoria tourna sa tête vers la gauche pour refuser (ce que politiquement elle fit tout le reste de sa vie) et ...vit plein de gamins qui s'empiffraient de friiites en rigolant avec plein d'huile qui leur coulait autour de la bouche, elle fut dégoutée de la vie et espéra grandir très vite afin de se joindre à eux pour toujours.

Ainsi va la vie Sister, nous voulons toujours autre chose alors que le présent est là, qui nous est donné ici et maintenant.
Qui c'est qu'a parlé...c'est toi monsieur ange ?