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vendredi 10 juin 2016

L'Arpenteur d'étoiles - Internet a disparu

LOÏS & CLARK (synopsis)

- Scène 1 -

- Ah, non, peste, cela est impossible, pas aujourd’hui, pas maintenant !
(L’homme apparaît voûté devant son ordinateur. Sur l’écran, on voit clignoter « connexion impossible ». Son immense cape semble désespérée. Il se retourne et se lève péniblement. Son corps se déplie et laisse apparaître une musculature impressionnante)
- Ah mon Dieu, que vais-je devenir ? (Il se lamente en se tordant les mains)
(La porte de son bureau s’entrouvre et une silhouette s’inscrit dans l’embrasure)
- Eh bien chéri, que se passe-t-il ?
- Mon ordinateur dysfonctionne, mon amour. Je suis fort embarrassé !
- Oh mon pauvre chéri. En quoi puis-je t’aider ?
(La silhouette est désormais en pleine lumière. Elle est très belle et tient un saladier dans la main gauche et un fouet de cuisine dans la main droite. Elle s’avance, pose les ustensiles et s’approche de l’homme. Elle pose sa main sur le torse puissant)
- Ne sois pas si stressé, mon Clark chéri. Tu as vécu tant d’autres situations bien plus délicates.
- Tu as raison, mon ange. Je dois me ressaisir (il se tient droit, de profil, la lumière sculpte sa plastique parfaite et semble irradier son visage)
- Mais, dis-moi, Loïs, que dois-je faire maintenant ?
- Eh bien, prendre ton petit déjeuner. J’étais en train de préparer des œufs brouillés. (Elle reprend le saladier, le fouet, et sort de la pièce vers la cuisine. Il lui emboîte le pas dans un bruit un froissement de tissu)

- Scène 2 -

(Ils sont assis à une table de plastique rouge vif. Devant eux, bols, assiettes, couverts, pains toastés, mugs de couleur, jus de fruit)
- Tu te sens mieux, mon chéri ?
- Oui, merci mon amour, mais aide moi à mettre de l’ordre dans mes idées. (Il se tape sur les tempes avec les deux mains)
- Bien : quel était ton programme du jour ?
- Tu as raison. Rationalisons l’événement. Que ferai-je sans toi qui vins à ma rencontre ? (Il la regarde amoureusement. Elle lui rend son regard et frôle sa main droite)
- Je devais arrêter le déraillement de trois trains dont un TGV en gare du Creusot, éteindre un incendie en forêt équatoriale, empêcher douze attentats djihadistes en Europe, repasser mon deuxième collant et me rendre sur krypton, pour voir maman. (Il est à nouveau bouleversé et se tord les mains)
- Tu avais besoin d’internet pour tout cela, Clark ?
- Oui, bien sur, pour préparer les plans de vol, comprends-tu. ? T’ain, t’es conne ou quoi ? (il prononce cette dernière phrase en hurlant)
- Calme-toi, mon ange (elle s’est levée, se place derrière lui et lui masse les épaules avec dextérité)
- Oh, pardon, je m’en veux d’être aussi soupe au lait, tu sais. Je t’aime ma Loïs.
- Je t’aime aussi, mon Clark. (Ils s’embrassent avec fougue)
- Mais, as-tu essayé de travailler ton imagination et ta mémoire ?
- Doux jésus ! Où avais-je la tête ! Mais bien sur ! (Il se précipite dans son bureau, renverse la cafetière qu’il redresse immédiatement grâce à son regard bionique)
- Oui, oui, mon cerveau fonctionne, je vais pouvoir sauver le monde. Que serais-je sans toi qui vins à ma rencontre ? (Il est heureux comme un enfant et rit à gorge déployée. Elle rit aussi comme une folle en se roulant sur le canapé du salon)
- Je m’occupe de ton collant. Va, mon amour et ne rentre pas trop tard. Les Tarzans viennent dîner ce soir.
- Oui, je sais, je m’en souviens aussi. (Il rit encore et s’envole par la fenêtre, le poing tendu vers l’infini galactique. Elle le regarde disparaître dans le soleil, une larme au coin de l’œil)

- Coupez !
- On la garde. Bravo les enfants. Je vais voir les rushes tout de suite.
- Euh … désolé, patron, sans internet, impossible. Les vidéo sont sauvegardées sur le cloud … alors ...
- Mais j'ai conservé mon carnet de notes ! Un truc de vieux !


jeudi 9 juin 2016

Marité - Internet a disparu

Milou, ses vaches et internet.

Dans une ferme du Poitou, c'est l'heure de la dernière traite de la journée pour les vaches de Milou. La 126 et la 144 attendent patiemment leur tour devant le tourniquet qui en s'ouvrant donne accès à la salle des trayeuses.

Elles observent pensivement le fermier installé dans son bureau devant son ordinateur.
Soudain la 144, une belle normande à l'œil de velours, se tourne vers sa voisine, une Prim'Holstein au pis avantageux et lui dit :
- Et si internet disparaissait ? Ce serait chouette. Qu'en dis-tu ?
- Pas grand chose répond la 126 désabusée. Ou qui n'a pas du tout envie d'ouvrir ce genre de débat.
- Quoi, pas grand-chose ? Ça te plait, toi de porter ce collier avec un boîtier électronique autour du cou ? Et qui nous flique en plus ? Je préférerais une cloche qui tinte joliment moi.
- Qui nous flique. Tu en as de bonnes toi. Si Milou n'avait pas été averti tout de suite que je mettais bas il y a un mois, mon veau serait mort étouffé.
- Peut être. Mais pour ce qu'on en profite de nos veaux...On nous les enlève dès leur naissance pour que nous produisions encore plus de lait. Et il faut donner toujours plus de lait ! Tu as remarqué je suppose que la satanée machine qui distribue les farines - même pas du bon foin odorant - devient avare quand nous prenons de l'âge et que nous avons moins de lait. Encore la faute à ce boîtier !
- Tu es rétrograde ma pauvre fille. Il faut vivre avec son temps. Je trouve que depuis que Milou a entièrement modernisé la ferme, on vit mieux. Tiens, par exemple, quand j'ai mal aux pattes, Milou le voit tout de suite et me donne des médicaments qui me soulagent. Si internet ne l'avertissait pas, il ne se rendrait même pas compte que j'ai les pattes enflées.
- Ah parce que tu penses que c'est bon pour ta santé tous ces médocs qu'il te fourgue ? Tu n'aurais pas mal aux pattes si tu gambadais dans les prés au lieu de piétiner toute la journée sur le ciment rempli de fumier. Moi j'en rêve de la vie d'avant. Ma grand-mère me racontait...
- Ta grand-mère. Ta grand-mère. Laisse la tranquille ta grand-mère. Elle était du siècle dernier. Il y a longtemps qu'elle a fini en steak haché dans le meilleur des cas et dans le pire, en bouillon cube pour potage.
- Je ne te permets pas. Elle a eu une belle vie elle. D'abord, elle n'était pas un numéro. Elle s'appelait
Clairette parce que son poil était blond. C'est beau Clairette. Si ce foutu internet n'existait plus, on nous donnerait un nom je suis sûre. Tu aimerais quoi, toi ?
- Ah, ça oui. J'ai toujours rêvé de m'appeler Marguerite.
- Comme dans "la vache et le prisonnier" ?
- Hein ? C'est qui cette vache ?
- Ma pauvre 126 ! Tu ne connais même pas tes classiques.
- Peuh ! C'est même pas original Marguerite. Moi je choisirais Vachkirie.
- Tiens ! Où as-tu déniché ce truc ridicule ?
- Ridicule ? Pas du tout. Je l'ai inventé en regardant la collection de boîtes à fromage de Milou. Je parie que tu ne les as jamais remarquées sur l'étagère de son bureau. Pourtant, ces boîtes ont contenu notre lait. Enfin du fromage fait avec notre lait. J'adore celle où l'on voit une belle tête de vache, très souriante, avec de grandes boucles d'oreilles.
- Arrête 144 ! T'es trop bête. Tout le monde se moquerait de toi. Vachkirie ! Je te demande un peu.

On pense tout de suite à Valkirie. Et, pardon ma belle mais tu n'es plus vierge depuis longtemps.
- Puisque nous parlons de sexe, je sens que je suis fiévreuse. Son mouchard va encore dire à Milou que j'ai mes chaleurs. Et je ne sais pas toi mais moi, je n'aime pas du tout ce tube à inséminer dans mon intimité. Ma grand-mère me racontait qu'elle et Zétor...
- Ne recommence pas avec ta mémé. Tu me fatigues.
- Si seulement internet n'existait plus, peut être que Milou viendrait prendre mon lait lui-même. Qu'est ce que j'aimerais ça ! Le contact, je voudrais du contact. Avec cette foutue informatique, nous sommes des pions.
- Tu rêves ma belle. Avance, c'est à nous pour le tour de manège. Et ne fais de rétention de lait, s'il te plait. Je ne veux pas d'histoires : Milou nous observe sur son écran en ce moment. Pas envie qu'il me prenne pour une meneuse syndiquée.

Clémence - Internet a disparu

Elucubrations.

« On pourrait mettre son lit sur la rivière, elle ne se réveillerait même pas arrivée à la mer... » disaient mes parents lorsque j'étais petite.
Ce luxe d'un sommeil de plomb ne m'a jamais lâché, qu'il vente ou tempête ! En revanche, au fil du temps, les bruits infimes suscitaient une légère prise de conscience. Mais, sitôt identifiés, elle s'effaçait discrètement.

Hier soir, je me suis couchée en respectant scrupuleusement mon rituel. L'heure était enfin venue d'éteindre la lumière et de m'enfoncer voluptueusement dans les méandres du lâcher-prise.
Pendant la nuit, il m'a semblé avoir entendu quelques subtils crépitements : la chute d'une brindille du grand chêne, un geko en sortie nocturne, le frôlement d'aile d'une chouette…

Le silence revint. Rassurant.

Le matin, je me réveillai naturellement. Mon regard se porta vers le radio-réveil. L'écran était noir. Je regardai le téléphone. L'écran était noir. Pas normal tout ça !
Je me dirigeai vers la salle de bain. L'eau était chaude, mais le courant était aux abonnés absents.

Je pris la direction du cellier où nichait le compteur. Tout était normal. Et pourtant, il n'y avait pas d'électricité. Je pris ma cafetière italienne pour me faire un café. Il restait un fond de café moulu. J'étais sauvée…

Alors que je sirotais mon breuvage, mes pensées se firent de plus en plus amères au fur et à mesure que ma liste de « pas pouvoir » s'allongeait.

Je me rendis chez ma voisine. Je sonnai. Pas de réponse. Je tambourinai , elle ouvrit.
- Je n'ai plus de courant…
- Moi non plus…
- C'est embêtant…
- Très embêtant…
- Faudra prendre patience…
- Patience…

La nouvelle se répandit comme un jeu de passe-passe. Le soir venu, il me fallut admettre l'évidence.
Plus de courant, plus d'internet. Je pris une feuille de papier que je partageai en deux colonnes : ce que je devais faire et comment je ferais sans internet ni électricité.

La liste et mon visage s'allongeaient lamentablement. Pour ne pas sombrer, je me pris à rêver d'une nouvelle vie, d'une nouvelle ère…Mais l'avenir qui se dessinait était étrange. Je tentais d'en cerner les paradoxes. Ceux-ci me glacèrent …

Mais à quoi bon me tourmenter, vous tourmenter, vous affoler? D'ailleurs, Internet a disparu. Je suis seule et personne ne peut entendre mon désarroi. Je suis absorbée, engloutie par « Le Cri ». Je me disloque...je disparais…

Et c'est alors que je sens la caresse chaude d'un rayon de soleil sur ma peu nue et que le campanile résonne de ses neufs tintements….

mercredi 8 juin 2016

JCP - Internet a disparu

Dictature végétale*
                        
Plus vaste que les terres connues, plus large encore que les mers réunies, le réseau de fils dont la maille infinie véhiculait le flux continu des électrons, modulés tous par la parole, le son, l'image et le mot, s'est tu ce matin.
Le Grand Réseau n'est plus.
Aussi faut-il craindre que ces lignes, pour ainsi dire confiées à une bouteille à la mer en un pays sans mers, ne soient point lues : "Internet Explorer a cessé de fonctionner", annonce un message railleur, venu des soubassements de mon ordinateur privé désormais de sa fenêtre sur le monde !

Sont-ce les prémices de la nouvelle guerre, mondiale, totale, finale ? Allons-nous tous trépasser carbonisés, poussière grise envolée aux quatre vents ? La terre outragée va t'elle se voir libérée de la moisissure humaine qui ronge sa peau, va t'elle reprendre sa liberté, et peut-être, certaine enfin d'en finir avec les ravages de la science et de la technologie, va t'elle, l'humain disparu sans regrets, rappeler le dinosaure ami à la cervelle trop modeste pour lui porter nuisance ?
Ces mots sont peut-être mes derniers, mornés sous ce clavier avant d'avoir connu meilleur asile... j'attends l'explosion finale, curieusement peu inquiet (on nous a tant prédit la fin de ce monde...)

Cependant, plutôt que de céder à la panique, j'interrogeai du regard mon ami le grand cèdre, celui qui, désormais grandi, ombrage mes vieux jours. Voyant alors à son écorce un relief incertain, à ses aiguilles une manie fuyante, et à sa branche un étrange cintre, je connus sans provoquer d'interrogatoire son incontestable culpabilité : entre deux de ses puissantes racines, assurément, coupable facétie, le traître avait broyé ma connexion enterrée !
Arrosé sans compter dans son jeune âge, et gratifié des meilleurs des azotes comme des sels les plus fins, quel message le noble végétal me transmettait-il ? Quelles insuffisances, quels manques affectifs me faisait-il payer de ce terrible forfait ?

Par le câble brisé où, je dois le dire, tant de choses captivantes passaient, sans doute je dus négliger quelque peu mon ami de bois... peut-être exprimait-il un dépit jaloux, lentement mué en invisible et sournoise vengeance souterraine ?...

Je ne lui en tins pas rigueur - d'autres que moi l'eussent abattu sur le champ -, et rétablis mon contact avec le vaste monde d'un simple câble aérien, éloigné par prudence des grands bras d'un ami trop possessif.

Ayant fait en mon âme une amende honorable, désormais je ne manque pas de saluer - d'un sourire un peu crispé - sa dictatoriale présence quatre fois par jour, espérant apaisé pour toujours son insaisissable courroux de végétal.

* Ce récit est basé sur des faits réels.


mardi 7 juin 2016

Mel - Internet a disparu

Certains disent qu'il est mort
Si ça se trouve, juste il dort
S'il est mort
Point de remords
J'en étais bien trop mordue
Il me prenait trop de temps
Internet est captivant
Plus jamais le temps d'avant
Où on prenait encore le temps
D'aller se voir, se rencontrer
Tout se passe sur le réseau
A coup de jolies photos
A qui sera le plus beau
Et il y a tous ces blogs
J'en déblogue
Trop d'amis d'un seul coup
Cà vous monte un peu le chou
S'il est mort
Je suis débarrassée
Libérée, mais

Si ça se trouve, juste il dort.

Emma - Internet a disparu

Le Deal

Le grand bug de l’an 2000 avait foiré, il fallait s’y résoudre.
Le Prince des ténèbres s’était cru Malin, mais il avait bel et bien loupé son grand soir.
Comme toujours en pareil cas, il accusa les cyber-démons d’incompétence majeure, et ceux–ci, (comme tous les sous fifres en pareil cas), menacèrent à leur tour des flammes de l’enfer les petites mains laborieuses. A savoir l’équipe des 666 branquignols hackers (recrutés il est vrai un peu à la va-vite sur un site d’intérim à la papa) qui, on n’est jamais trop prudent, s’étaient réfugiés sur le pic de Bugarach.
Ils furent contraints à signer avec leur sang un nouveau pacte qui s’appela LE DEAL, dont hélas il ne reste aucune trace.
Et pour cause.

Lucifer ne détestait pas vraiment internet : il y passait même de bons moments, et pas seulement dans le deep web, mais il était devenu jaloux des humains qui se moquaient de lui, usurpaient ses prérogatives pour recréer le mal sous toutes ses formes et le démultiplier à la vitesse de la lumière.
Et puis son job, c’était quand même de perdre les hommes…

Et un beau matin, miracle ! (façon de parler). Ecrans noirs sur tous les bureaux du monde. Vérifications, appels frénétiques, engueulades !
- où t’as foutu la liste des mots de passe ? pleuraient les ménagères de plus de 50 ans.
- t’as essayé de brancher ? rigolaient les pépés goguenards.
Bientôt les trottoirs de Wall street furent jonchés d’appareils lancés par les fenêtres, de peu suivis par les financiers eux-mêmes, comme aux plus beaux jours de la crise de 29.
Les cadors de la silicon valley mis en demeure par les puissants de restaurer le système se suicidaient en direct sur les plateaux des talk-show.
Puis les écrans télé eux-mêmes se couvrirent de lignes scintillantes. Sur les plateaux des talk-show les écrivains nonagénaires au visage déformé crachotaient : Quelle merveille de retrouver crayon et papier, la rature est d’une jouissance extrême…

Eh oui, dit Dieu venu s’asseoir sur le nuage d’où Belzébuth contemplait le spectacle. Eh oui, mon vieux (une familiarité engendrée par des millions d’années de compétition stimulante) eh oui, gros Malin, tu n’as pas réalisé que tirer sur un fil de la toile débobine tout notre foutu boulot ?

Très vite financiers, écrivains nonagénaires et trafiquants furent contraints à donner leurs ordres et délivrer des messages codés à la radio "l’essentiel est invisible pour les yeux ; le chat de la voisine aime la bonne cuisine ; dansons la carmagnole ; Marcel, chez Rico, comme d’hab ; elle me fait pouet pouet, je répète : elle me fait pouet pouet…"

- Quelle merveille que ces horribles liseuses ne marchent plus disaient les dames raffinées, tourner les pages d'un livre papier est si sensuel.. juste avant que Gutenberg ne s'attire les foudres des copistes…

- Quelle merveille d'élever des chèvres et cultiver des racines disaient les ministres écolos de retour dans les Cévennes, juste avant de se replier dans des grottes mal famées pour tenter d'échapper au tigre aux dents de sabre.

Quand même, Dieu, s'il te plait, implorait Satan, y'aurait pas moyen de faire "pause" de temps en temps ? J'aimerais bien revoir tranquillement mes séries préférées de massacres, surtout ceux en costume, la guerre de cent ans par exemple ?

Mais une nuée ardente emporta sa voix dans le fracas d'un méga volcan en éruption.

Bonjour chez toi, tonna Dieu, moi je retourne faire la guerre des étoiles !

lundi 6 juin 2016

Laura Vanel-Coytte - Internet a disparu

Le roi est mort, vive le roi !

Internet a d’abord disparu
On l’a cherché dans les rues
Dans les voitures, les maisons
Les bus, le métro et les camions.

On a lancé une alerte enlèvement
La panique même au gouvernement
Des appels anonymes pour dénoncer
Le voisin perturbaient les policiers.

Internet a disparu, ouvrons une cellule de crise
Comment lancer des rumeurs –surprises ?
Sans cet outil indispensable aux journalistes
Pour nous mettre sur de fausses pistes.

Le désespoir a gagné les plus jeunes
Internet était mort, il fallait l’admettre
Les plus vieux qui n’avaient pas su s’y mettre
Respiraient comme après un long jeûne.

Internet a disparu, ils purent ressortir
Leurs journaux et leurs livres sans souffrir
La moquerie de leurs descendants
Qui les regardait avec envie maintenant.

Comme ce papier leur paraissait séduisant
Mais aussi inconnu et donc effrayant
Sauraient –ils prendre ce nouveau virage ?
Sans mémoire des mots et des pages.

Le roi internet est mort, sa dictature
De l’immédiateté a cédé sous la pression
Des patients qui attendaient leur heure :
Rêveurs, imaginatifs et lecteurs.

Le roi internet est mort
Vive le roi-livre !

Vegas sur sarthe - Internet a disparu

L'équidé de Troie

Lutetia – rue des Amphores – 6 juin 410 – meridies moins 10

«Ave Caïus Asus»
«Ave Caïus Hadopis. Quid novi? T'en fais une tête»
«Tu m'étonnes... j'ai la tête du gars qui vient de perdre son boulot»
«Quid factum est? Raconte»
«Figure-toi qu'hier soir j'avais plus de connexion, alors j'ai commencé par engueuler les gamins qui bidouillent sur Face-de-Bacchus dans mon dos... mais c'était pas eux pour une fois»
«Et alors?»
«Alors j'ai coupé leur chat – leur tchat, pas le greffier – j'ai fait mon César et j'leur ai dit: Allez jacter à l'Est»
«Et y z'y sont t'été?»
«Tu parles, alors j'suis t'été au cyberforum du coin pour en avoir le cœur internet»
«Le cœur internet?»
«Mea culpa, j'sais plus c'que j'dis... pour en avoir le cœur net»
«T'es allé chez Gratis et Prodeo?»
«Non, au coin d'en face chez Prorata Temporis»
«Ah? J'le connais pas çui-là»
«Pas grave. Y vient d'fermer boutique quasi modo, tout comme l'autre et vice versa»
“Quoi, Quasimodo?”
“J'voulais dire: De la même façon”
«Tu devrais surveiller tes locutions, Caïus. Et alors?»

«Ben j'suis entré in extremis alors qu'y baissait son rideau et je'lui ai demandé manu militari s'il avait encore de la Toile”
«Et alors?»
“Alors arrête de dire toujours Et alors. Il avait plus de Toile, juste un vieux stock de papyrus comme naguère”
“Tu veux dire comme avant l'Antiquité? Celui qu'on utilisait pour les fax similé?”
“Non, ce machin égyptien qui venait d'Alexandrie ou d'Alexandra, qui faisait naufrager les papillons de la jeunesse et qu'on grattait pour pouvoir le réutiliser plusieurs fois”
“Ah Aaah! Voiles sur les filles! J'me souviens. C'était pas du Claudius Francius? Quelle galère! J'en ai encore un rouleau qu'on avait ramené de nos vacances à Herculanum et dont Rebecca se sert comme rouleau à pâtisserie pour faire ses cookies”
“Nous on fait plus de cookies, ça faisait trop de miettes sur le claviatura. Bref j'ai cuisiné le gars de chez Prorata et il m'a avoué qu'internet avait officiellement disparu!”

“Comment c'est possible un truc pareil?”
“J'ai pas tout compris. Tu sais ces gars-là parlent pas latin comme nous. Ca serait à cause d'un équidé de Troie porteur d'une maladie – une sorte de virus infectieux, comme des vers de Virgile mais en plus crade – qu'aurait foutu la zizanie intramuros, du coup le Conseil des Anciens a fermé tous les portails sine die”
“C'est donc ça que j'ai cru voir brûler cette nuit, y z'ont utilisé les pare-feu!”
“Ouais, du coup il va me rester sur les bras un discobole de cinq cent kilos-octets ad vitam aeternam”
“Ca va être vachement lourd à porter. Moi j'ai un Duralex de deux Omega-octets de chez Gratis et Prodeo”
“Euh... tu veux dire méga-octets?”
“Non, chez Gratis y disent Omega mais peu importe puisque ça va aussi me rester sur les bras”
“Alors tout est foutu? Même les navigateurs... c'était quoi ton navigateur?”
“J'avais fait confiance à Marcus Polo... ça ramait pas mal mais j'suis pas du genre pressé”
“Moi c'est un Oueb-masteur qui m'avait conseillé Tabarlus mais comme j'y perdais mon latin j'avais récupéré Safari grâce à un broker... tu dois connaître... un dénommé Pompée”
“Safari? Vains dieux! C'est le nec plus ultra, ça”
“Ouais mais ça m'fait une belle cnémide aujourd'hui! A quoi ça va servir tout ce matos, le computatrum, tous ces pixelus, ces protocolus, ces macrons?”
“Euh... tu veux dire ces microns ou ces macros?”
“Non, des macrons... c'est comme ça qu'y disent chez Prorata Temporis”
“Alors adieu ma version 3.0 des Jeux Olympiques en couleur avec l'option hécatombe”
“Idem, j'avais le jeu Kohlantus en ligne... et Rebecca pourrait t'causer de la série Gastronomia par Paulbocus!”

Soupir... (Suspirium, Suspiria au pluriel)

“Et les pseudos? J'aimais bien les pseudos, moi c'était Scipion l'Africain... et toi?”
“Moi c'était BrigitteBardo”
“T'es un marrant toi, drôle de prénom pour un mulet”
“Possible, tu sais on trouvait tout et n'importe quoi sur la Toile... avant”
“Dis donc, on va être vachement emmerdés pour notifier nos amis pour les agapes des voisins de quartier!”
“Attends un peu! Laisse moi réfléchir, j'ai plus l'habitude... ben on va aller voir tous les voisins du quartier”
“Oui mais si on va les voir maint'nant, ça veut dire qu'on va s'les farcir deux fois?”
“Ben oui... sine qua non?”

Manoudanslaforêt - Internet a disparu

Et si Internet venait à disparaître !
Les Impromptus littéraires ne seraient plus….
Mon blog, les vôtres n’ont plus….
Je crois que cela me manquerait aujourd’hui…

Jacou - Internet a disparu

Et si on se faisait une omelette ?

Internet n’est plus.
Plus d’écrans allumés,
Mais qu’allons- nous faire ?
Faire comme de mon temps, rigole pépé.
Pépé, tu te souviens, t’étais bien content quand t’as retrouvé Roger.
Roger, ce radoteur ! Et puis d’abord, je savais très bien où il était. C’est vous qui avez insisté.
Insisté ! Qui c’est qui disait tous les soirs : j’ai entendu dire qu’on pouvait retrouver des personnes avec internet.
C’était pour vous faire plaisir.
Et toi, t’as pas été content de savoir qu’il était toujours en vie ?
Mais j’y pense, il devait m’envoyer des photos. Si on n’a plus internet, comment je vais faire ?
Comme de ton temps, pépé.
Ecoutez les drôles, je crois que j’ai une idée.
On t’écoute.
Toi, tu vas téléphoner à madame Sifflet, lui demander l’adresse de son neveu.
Son neveu. Bien.
Toi, tu me cherches une enveloppe, tu vas acheter des timbres.
Des timbres, mais y’a pas de poste.
Tu prends ta bagnole, et tu vas à Champerony, là y’a encore une poste.
Oui, mais pépé, en ce moment y’a les poids lourds qui bloquent les raffineries et j’ai plus d’essence.
Vas-y en vélo.
D’accord. Ça coûte combien un timbre ?
Tu verras bien. T’es pas encore parti ?
Tant que j’y suis, t’as besoin d’autre chose ?
Rapporte- moi le journal. Peut-être que c’est juste une grève, pour internet.
J’ai l’adresse du neveu.
Passe la moi ; t’as l’enveloppe ? Ya plus qu’à attendre le timbre. T’es déjà là ? T’as fait vite. Tu pourrais t’inscrire au Tour de France. Alors, ça coûte combien un timbre ?
Pépé, la poste, elle était fermée.
Comment ça, fermée ! On n’est pas dimanche ! Quoique maintenant…
Elle ouvre que trois après-midi par semaine. J’irai demain.
Hébé, au moins, ça te fera de l’entrainement.
Au fait, c’est quand qu’il commence le Tour de France ?
Attends, je vais chercher sur…et merde ! J’avais oublié.
C’est pas grave. En attendant, si on jouait aux petits chevaux.
Pépé !!!!!Pourquoi pas à la bataille, tant qu’on y est.
Allez, tiens, si on allait se chercher des champignons. On se ferait une bonne petite omelette.

T’as des œufs, au moins ?
Oui, pour ça, mes poules, elles ont pas besoin d’internet.

Où lire Jacou

Semaine du 6 juin au 12 juin 2016 - Internet a disparu

Et si Internet venait à disparaître ?
Ce thème proposé par Emma sera le sujet de cette semaine.

Dépêchez-vous de nous envoyer vos textes en vers ou en prose à l'adresse habituelle impromptuslitteraires[at]gmail.com avant que cette catastrophe ne survienne et dans le meilleur des cas avant dimanche 12 juin à minuit