mercredi 26 novembre 2014

Adrienne - 18h45

D comme déclaration

Il prenait comme moi le 18h45 mais je ne le savais pas. Jusqu’à cette chaude journée d’avril où le hasard m'a fait monter dans le même wagon. Je venais juste de hisser à grand-peine mon sac de voyage dans le filet quand je l’ai vu qui me regardait en souriant. La première idée qui m’est venue, c’est que je devais être rouge et échevelée et que peut-être j’avais des auréoles de transpiration sous les bras.
- Tu peux venir t’asseoir ici, si tu veux, m’a-t-il dit en me désignant la banquette en face de lui.
 

J’ai jeté un coup d’œil désespéré à mon gros sac plein de livres et de linge sale.
- Tu peux le laisser là, a-t-il ajouté, tu le prendras quand on descend, ça ne gêne personne.
 

Depuis ce jour-là, nous avons fait route ensemble chaque samedi. J’apprenais à mieux le connaître même si c’était surtout lui qui posait les questions. Quatre ans de plus que moi, ça compte quand on n’en a que dix-huit : il était déjà en premier doctorat alors que moi je n’avais encore rien prouvé. Il me paraissait toujours aussi inaccessible qu'à mes quatorze ans. J’aimais son humour, ses yeux bleus, son nez busqué, son surpoids, sa canine un peu de travers, j’aimais tout.
Toute la semaine je dessinais son profil sur mes notes de cours et le samedi je l’admirais dans le wagon de train.
Il n’en a jamais rien su.

Où lire Adrienne
 

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