Elle prenait le 18h45. Pour elle aussi c’était la première fois. Deux
solitudes fracassées recherchant l’oubli dans un voyage au long cours. Du
bercement régulier des bogies dans la nuit tiède naissait la rêverie. Les
senteurs d’acajou et de vieux cuir de la cabine se mêlaient aux arômes acidulés
des grandes plaines, qui glissaient par la fenêtre à peine baissée.
J’avais
entr’aperçu sa silhouette sur le quai, environnée de valises et des voix des
porteurs. Maintenant c’était les effluves légers de son parfum qui dansaient
dans le couloir.
Nous avons croisés nos regards au wagon-restaurant et nous nous sommes frôlés
dans les passages vers le grand salon. Et puis il y eut cette halte sur les
bords ombreux du Danube. Depuis une ruelle, un violon tzigane solitaire avait
lancé sa plainte … Elle m’a regardé : « vous savez, la seule chose importante à
présent, ce sont les tendres prémices de l’été » ... Pouvions-nous faire
autrement ?
Nous nous sommes endormis, calés contre l’autre, bercés par le
roulement apaisant du train filant vers les premières lueurs de l’aube, exquise
promesse d’éternité.
Belgrade, Sofia, Istanbul. Couleurs éclatantes, parfums d’épices, reflets
mauves de la mer. En contrebas, le murmure de la ville montait par bouffées dans
l’air du soir ... « je t’aime » au creux de mon épaule, dans nos mains qui
s’accrochent, au bord de nos lèvres, dans l’eau de tes yeux clairs ...
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