Chemin de mémoire
Demain, j'irai mettre mes pas dans leurs pas. J'irai parler à mes ancêtres paternels comme je le le fais très souvent en cette période idéale pour le souvenir. Demain, j'irai leur parler à travers ce village que j'aime comme je le fais à chaque visite.
Clédat, village d'un autre temps, dont le nom occitan signifie" parc à moutons", si l'on te découvrait par hasard, on pourrait croire à une chimère. Chacun sait pourtant en allant à ta rencontre qu'il va vers un rêve. C'est en tout cas mon sentiment intime quand un désir irrépressible me pousse jusqu'à toi. Peut être parce que mes racines paternelles s'ancrent si profondément comme les tiennes entre Millevaches et Monédières. Parmi ces bois, landes et bruyères. Je ne sais pas. Je viens simplement communier avec toi et me repaître de ta sérénité en ces jours ensoleillés d'automne propices à la nostalgie.
Je pousse doucement une claie invisible pour fouler d'un pas tranquille et incertain ton sol inégal. Ici, rien de solennel. Seulement le silence. Le silence d'un temps suspendu que je ne saurais profaner pour ne pas interrompre cette douce sensation d'apesanteur, cette impression forte d'un ailleurs secret et inviolé procurées par ton approche.
Le ciel pur et serein de novembre te couvre de sa lumière et rend plus verts encore les sapins qui t'entourent. Un rayon de soleil oblique plonge sur la chapelle se brisant sur le bronze de sa cloche. Il fait naître un halo diaphane qui éclate sur le minuscule édifice le parant d'une lueur diffuse et dorée.
J'avance parmi les pierres tiédies et une étrange fascination me saisit à la contemplation des blocs rocheux s'épaulant pour soutenir tes ruines. Une impression troublante de force et de fragilité émane de tout ce qui te compose. Je ne peux croire à de noires légendes te concernant. La mémoire n'est pas annihilée pour autant. Sa présence m'enveloppe mais sans discordance. Aucune âme damnée ne vient par ses plaintes et ses errances troubler ta quiétude. Seule sourd encore de tes tréfonds la sueur laborieuse d'anciens paysans. Je les vois alors : Guillaumette, Bénigne, Ermenancienne au nom étrange et Mélanie, mes aïeules. Jammet, Léonard et Jacques. Ils me frôlent. Ils marquent leur empreinte en moi chaque fois un peu plus.
Il flotte entre tes murs éventrés et nus des images rugueuses de bêtes et de gens soumis à de dures épreuves journalières. La naissance, la vie, la mort, ces étapes immuables marquant chaque être prennent ici un sens profond et si elles ne concernent plus les hommes, elles trouvent encore leur vérité dans la moindre fleur, la moindre herbe poussant sur tes chemins. Ici s'unissent harmonieusement l'éphémère et l'éternel.
Tes maisons et tes granges effondrées ne m'apparaissent pas comme une plaie honteuse mais comme un aboutissement incontrôlable dû à l'ère nouvelle. Cependant rien de heurté. Simplement tu n'as pas voulu de l'irruption intempestive de la modernité et en cela tu es unique. D'ailleurs qui pourrait t 'en blâmer ? Pas moi. J'aime tes morsures lissées par le temps. Elles vont si bien à mon âme en quête d'authenticité et de plénitude.
Mes pas me portent vers ta fontaine à peine visible dans son trou de mousse. La fraîcheur que son eau dispense sous le gros châtaignier me fait frissonner tout-à-coup. Je sais que là se cache ton coeur. Il bat à l'unisson de cette source. Et tu vis.
Je marche jusqu'au rocher qui surplombe la vallée de la Corrèze. Les derniers lambeaux de brume montent, s'estompent pour dévoiler un tableau que l'on voudrait enfermer en soi, la palette du meilleur peintre ne pouvant restituer la magie d'un tel spectacle. Je pense alors au regard bleu quelquefois lointain de mon père et je songe qu'il devait dans ces moments là revoir les paysages de ces Monédières qu'il aimait.
Je ne sais pas quels sont tes pouvoirs mais tu me livres un message fort et apaisant, celui de ta simplicité face à une nature puissante. Et je me sens humble, rassérénée et conquise. Comme à chaque fois.
Demain, j'irai mettre mes pas dans leurs pas. J'irai parler à mes ancêtres paternels comme je le le fais très souvent en cette période idéale pour le souvenir. Demain, j'irai leur parler à travers ce village que j'aime comme je le fais à chaque visite.
Clédat, village d'un autre temps, dont le nom occitan signifie" parc à moutons", si l'on te découvrait par hasard, on pourrait croire à une chimère. Chacun sait pourtant en allant à ta rencontre qu'il va vers un rêve. C'est en tout cas mon sentiment intime quand un désir irrépressible me pousse jusqu'à toi. Peut être parce que mes racines paternelles s'ancrent si profondément comme les tiennes entre Millevaches et Monédières. Parmi ces bois, landes et bruyères. Je ne sais pas. Je viens simplement communier avec toi et me repaître de ta sérénité en ces jours ensoleillés d'automne propices à la nostalgie.
Je pousse doucement une claie invisible pour fouler d'un pas tranquille et incertain ton sol inégal. Ici, rien de solennel. Seulement le silence. Le silence d'un temps suspendu que je ne saurais profaner pour ne pas interrompre cette douce sensation d'apesanteur, cette impression forte d'un ailleurs secret et inviolé procurées par ton approche.
Le ciel pur et serein de novembre te couvre de sa lumière et rend plus verts encore les sapins qui t'entourent. Un rayon de soleil oblique plonge sur la chapelle se brisant sur le bronze de sa cloche. Il fait naître un halo diaphane qui éclate sur le minuscule édifice le parant d'une lueur diffuse et dorée.
J'avance parmi les pierres tiédies et une étrange fascination me saisit à la contemplation des blocs rocheux s'épaulant pour soutenir tes ruines. Une impression troublante de force et de fragilité émane de tout ce qui te compose. Je ne peux croire à de noires légendes te concernant. La mémoire n'est pas annihilée pour autant. Sa présence m'enveloppe mais sans discordance. Aucune âme damnée ne vient par ses plaintes et ses errances troubler ta quiétude. Seule sourd encore de tes tréfonds la sueur laborieuse d'anciens paysans. Je les vois alors : Guillaumette, Bénigne, Ermenancienne au nom étrange et Mélanie, mes aïeules. Jammet, Léonard et Jacques. Ils me frôlent. Ils marquent leur empreinte en moi chaque fois un peu plus.
Il flotte entre tes murs éventrés et nus des images rugueuses de bêtes et de gens soumis à de dures épreuves journalières. La naissance, la vie, la mort, ces étapes immuables marquant chaque être prennent ici un sens profond et si elles ne concernent plus les hommes, elles trouvent encore leur vérité dans la moindre fleur, la moindre herbe poussant sur tes chemins. Ici s'unissent harmonieusement l'éphémère et l'éternel.
Tes maisons et tes granges effondrées ne m'apparaissent pas comme une plaie honteuse mais comme un aboutissement incontrôlable dû à l'ère nouvelle. Cependant rien de heurté. Simplement tu n'as pas voulu de l'irruption intempestive de la modernité et en cela tu es unique. D'ailleurs qui pourrait t 'en blâmer ? Pas moi. J'aime tes morsures lissées par le temps. Elles vont si bien à mon âme en quête d'authenticité et de plénitude.
Mes pas me portent vers ta fontaine à peine visible dans son trou de mousse. La fraîcheur que son eau dispense sous le gros châtaignier me fait frissonner tout-à-coup. Je sais que là se cache ton coeur. Il bat à l'unisson de cette source. Et tu vis.
Je marche jusqu'au rocher qui surplombe la vallée de la Corrèze. Les derniers lambeaux de brume montent, s'estompent pour dévoiler un tableau que l'on voudrait enfermer en soi, la palette du meilleur peintre ne pouvant restituer la magie d'un tel spectacle. Je pense alors au regard bleu quelquefois lointain de mon père et je songe qu'il devait dans ces moments là revoir les paysages de ces Monédières qu'il aimait.
Je ne sais pas quels sont tes pouvoirs mais tu me livres un message fort et apaisant, celui de ta simplicité face à une nature puissante. Et je me sens humble, rassérénée et conquise. Comme à chaque fois.
C'est singulier comme l'idée d'un Demain nous ramène vite au passé.
RépondreSupprimerMerci pour ce pèlerinage apaisant chez tes ancêtres, Marité et... à tantôt
Merci Végas. En plus de ton talent tu es sympa et j'apprécie énormément.
RépondreSupprimerJe suis consciente du décalage de mon texte et en suis désolée. Mais j'avais très envie de parler de ces lieux où ont vécu mes ancêtres n'ayant, pour raisons graves, pu participer la semaine dernière.
Merci à toi Marité d'avoir conjugué de si belle manière - et malgré de graves raisons - deux thèmes antagonistes... Racines et Demain
SupprimerUn demain en forme de refuge...
RépondreSupprimerC'est tout à fait ça Chri.
RépondreSupprimerton texte "2 thèmes en 1 seul" est magnifique
RépondreSupprimercar aller rendre hommage demain à ceux qui ont permis que tu sois c'est une bonne chose, saine et apaisante, de l'ordre des rituels qui nous font sentir humain
j'espère cependant que les raisons "graves" ne sont pas trop douloureuses :(
C'est un très joli texte. Profond, il me parle et fait écho à des souvenirs, des sensations, des images ... Merci ;-)
RépondreSupprimerMerci beaucoup. :-)
RépondreSupprimer@ Tisseuse : Il vous tombe parfois "sur le coin de la figure" des événements imprévisibles qui chamboulent toute une famille. Merci pour ton empathie. ;-)