La voyageuse et l’écrivaine
Elle m’attend dans son jardin plein de violettes et d’oiseaux. Enluminée d’une aura de mystère, parfumée au lys.
Assise sur le banc près de la treille, elle a ce sourire énigmatique, retenu mais gracieux qui la caractérise. Je me pince.
- Gabrielle-Sidonie... Je bredouille, légèrement empourprée de fièvre. Permettez-vous que je m’assoie près de vous ?
Elle m’y invite d’un geste de soie.
Elle promène son index le long de mon bras, C'est sensuel et doux.
- J’aime les jolies femmes. Sa voix est un peu voilée par l’abus du fume-cigarettes. Mais j’aime les hommes aussi, ha ha ha ! Son rire éclate en perles.
Alors elle me raconte sa vie. Tumultueuse. Bisexuelle. Sulfureuse. Libre, et en même temps prisonnière d'une douleur sourde. Elle me parle de ses chats, de ses conquêtes, de ses erreurs. De ses plumes sergent-major, de l'enfance, de son père le capitaine Jules-Joseph, de sa mère Sido qui écrit en secret. De la campagne et de la ville, de la vie mondaine et des racines terriennes.
Amoureuse de la vie, des ruisseaux et des fleurs, avide de cette subtile caresse qu’offre l’existence quand on s’adonne à elle avec passion.
Amoureuse de l’écriture, cette impérieuse et incoercible pulsion… Vous comprenez, Célestine, souffle-t-elle, « écrire ne conduit qu'à écrire. Avec humilité, je vais écrire encore. Il n'y a pas d'autre sort pour moi. Mais quand s'arrête-t-on d'écrire? Quel est l'avertissement? Un trébuchement de la main? J'ai cru autrefois qu'il en était de la tâche écrite comme des autres besognes; déposé l'outil, on s'écrie avec joie: Fini! Et on tape dans ses mains, d'où pleuvent les grains d'un sable qu'on a cru précieux... C'est alors que dans les figures qu'écrivent les grains de sable on lit les mots : à suivre... »
Quelle belle phrase ! Elle me fait comprendre combien écrire ça prend le ventre, et dépasse la volonté. Elle éclaire le douloureux bonheur que j’ai de prendre la plume. Un bonheur, finalement, toujours « à suivre…»
Je ne serai jamais écrivaine, seulement une voyageuse accrochant des étoiles à des feuilles de papier. Mais l'espace d'un instant, j'ai saisi une belle leçon d'écriture.
J'ai encore dans les oreilles la voix de Colette, un acceent bourguignon à couper au couteau, elle parlait des ses prrrrrojets lors d'une interview il y a fort fort longtemps.
RépondreSupprimerUn bel hommage que tu lui rends là, belles châsses. ];-D
J'ai adoré la visite du musée Colette, à Saint Sauveur.
SupprimerLes maisons d'écrivains me mettent toujours dans une espèce de transe.
Bisous Andiamounet
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un bel accent bourguignon et sa maison natale à Saint Sauveur en Puisaye est fort belle et revenue dans ses couleurs d'autrefois.
RépondreSupprimerEt Gabrielle Sidonie, ses livres sont magiques ...
(et par ailleurs j'ai suis ton blog qui est extraordinaire, avec des photos et des textes tellement beaux !!)
Quelle grande femme. J'ai beaucoup d'admiration pour elle.
SupprimerMerci l'Arpenteur, tu es le bienvenu dans mes pages.
Je t'embrasse
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Magnifique, je ne peux dire à quel point, tellement il me parle ce texte, tellement je souscris à 100 %, tellement il me permet de m'enflammer, tellement, même si je ne connais rien de Colette, il me permet de faire le parallèle avec des écrivains que j'adore comme Miller ou Cendrars, tellement à cent à l'heure je vis ce fantasme et cette réalité.
RépondreSupprimerBises Celestine.
Ps : Je voulais mettre un com' sur ton blog pour inviter les gens à venir lire ton texte ici. Mais l'inverse va. :)
Mon texte sera publié dans quelque temps sur mon blog, Patrick.
SupprimerMerci de ton enthousiasme, néanmoins.
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Quel bel hommage à une sacrée personne! Bravo Célestine.
RépondreSupprimerUne femme exceptionnelle, libre et qui ne voulait faire que ce qu'elle voulait...Tu imagines à l'époque ?je dévore son oeuvre, et je n'ai pas fini !
SupprimerMerci Chri
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je redouble le commentaire de Andiamo :)
RépondreSupprimermagnifique hommage rendu à cette grande écrivaine !
Comme quoi, le redoublement n'est pas toujours une mauvaise chose... ;-)
SupprimerBis repetita...
Merci Tisseuse
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Ton écriture, Célestine, s'enroule autour du thème du voyage comme le volubilis et le chèvrefeuille, comme les vrilles de la vigne au temps de Colette et des escarbilles, et embaume
RépondreSupprimerTu as le don de me faire rougir comme une praline de saint Genix...
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Merci d'avoir retranscrit cette leçon de si belle manière.
RépondreSupprimerA suivre... deux petits mots pleins de promesses, comme un "Encore" de gamin assoiffé, jamais repu.
Bravo pour ce traitement de la consigne, Célestine
Salut à Colette, d'un bourguignon respectueux :)
J'essaierai de penser à ton "encore"...et d'écrire...encore, je ne sais faire que ça.
SupprimerIl me vient, à l'évocation de ce gamin assoiffé et jamais repu, des tiraillements au niveau du plexus comme quand j'avais, tout contre mon sein, un doux marmot lové contre moi... ;-)
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Un grand merci pour ce texte magnifique dans lequel on se glisse avec volupté.
RépondreSupprimerLOIC
Avec volupté...c'est vrai, un grand plaisir sensuel.
SupprimerMerci Loïc
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La prégnante faim de l'écrit est sans fin. Tu en donnes une belle intuition qui laisse la pensée vagabonder sur un jardin grand ouvert. Merci Célestine ☆
RépondreSupprimerC'est en effet ce que je ressens. Une prégnante faim sans fin.
SupprimerEt la phrase de Colette a été pour moi une révélation.
Merci Tiniak
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