jeudi 9 mai 2019

Maryline18 - Un scénario

Un ruban dans mes cheveux

le soleil disparaissait déjà, derrière les collines, à quelques centaines de mètres du campement. Les femmes en tuniques de coton amples, entouraient le foyer circulaire et soufflaient sur les braises pour qu'elles reprennent. Les préparatifs allaient commencer pour la grande fête qui devaient durer une bonne partie de la nuit. L'air était doux dans la vallée, des chauves-souris tournoyaient au dessus des huttes faites de branchages et d'écorces d'essences diverses. Les enfants jouaient bruyamment, les hommes se reposaient, fatigués de leur journée de chasse.
Le fils du grand chef Apache, choisirait sa promise quand la lune serait là.
Trop d'attentions m'entouraient depuis le matin pour feindre ignorer que j'étais l'élue de son coeur. Sans mots prononcés par aucunes des femmes de la tribu, elle s'étaient pourtant affairées à me rendre la plus désirable possible, et cela depuis le lever du jour. Après une immersion dans l'eau vive de la rivière qui coulait en contre bas, des soins dignes d'un institut de beauté m'avaient été prodigués, suivis de massages prolongés avec une huile de lavande, sauvage et embaumante. Ma peau était plus douce qu'un pétale de rose, plus veloutée qu'une pêche, plus parfumée qu'un champ de fleurs des plus odorantes. Mes longs cheveux avaient été soigneusement lavés, selon des coutumes ancestrales, puis épouillés et tressés. Des bracelets d'étoffes colorées et enchevêtrées, soulignaient mes chevilles fines et mes avant-bras. Un maquillage confectionné avec des ingrédients aussi naturels que secrets, réhaussait mes pommettes. Une cushma d'un beau orangé enveloppait mes formes généreuses.
L'ambiance était joyeuse et familiale ; des rires illuminaient les visages. Tout était prétexte à la moquerie bienveillante, à la taquinerie. On fredonnait des airs, transmis de mères en filles et on sifflotait pour masquer les paroles oubliées. Le jeûne de la journée nous rendait légères et nonchalantes mais nous savions que le repas du soir nous comblerait jusqu'à satiété. Au menu il y avait une soupe de poissons, du singe, des patates douces et des fruits.
Riquiqui suivait de près les préparatifs en jappant gaiement. Il devinait que cette nuit, quelques beaux morceaux de viandes lui seraient offerts, une aubaine pour ce chien qui ne mangeait pas toujours à sa faim. Un mélange de bois brûlé, de fumet de poisson et d'herbes aromatiques s'élevait bientôt en volutes dansantes, au dessus de la marmite. Assise en tailleur, j'humais ces bonnes odeurs en me rapprochant du feu, jusqu'à ce que sa forte chaleur me rougisse les mains et les joues.
Cette nuit, une page allait se tourner. Un très beau chapitre de ma vie allait commencer. Cet homme, bon, droit, courageux et aimant me ferait sienne. Je serais à lui, comme la pluie à la terre, désormais, indispensable à son bien-être. Je l'arroserais de mille façons pour qu'il m'offre le meilleur. Les fruits de notre union se déclineront en autant de bons moments partagés, qu'une ondée matinale possède de gouttes d'eau. Avec mon arrosoir plein d'amour je noierai ses craintes, de vivre un hiver sans baisers. Mes averses de bons sentiments s'infiltreront par les fissures de son coeur trop timoré et emmèneront ses esquisses de projets vers des océans de possibles... Nous sèmerons main dans la main, les graines d'un bonheur tant désiré, écrit, sur les pages de la destinée. nous nous soutiendrons pour ne pas sombrer dans les ornières de l'indifférence silencieuse.
Quelques mots échangés me laissaient présager un futur tellement fertile. Notre union faisait maintenant partie des choses naturelles, de celles qui coulent de source, ce n'était plus qu'une question de temps. La nuit allait sceller nos regards amoureux, nos élans hésitants, nos âmes qui s'étaient reconnues... Les étoiles, nos témoins pour toujours, illumineraient nos lendemains pour doucement guider nos pas sur des chemins fabuleux.
La chaleur me fît glisser dans une douce torpeur. Je m'allongeai sur l'herbe tendre. Bientôt, les corps des hommes sautaient et tournaient autour du feu. J'entendais leurs chants qui m'enveloppaient, qui m'appelaient et je sombrai dans une transe troublante et sensuelle. Il s'approcha et noua un ruban carmin sur l'une de mes nattes. Par cette simple attention, il me désigna, me choisit comme sa reine de beauté, comme son alliée, comme son trophée le plus cher, au yeux de tous. Un trouble immense et une fierté nouvelle me traversaient.
Alors, un ronronnement se fît entendre, tout d'abord lointain, puis de plus en plus fort, de plus en plus près, jusqu'à m'importuner, jusqu'à me sortir de ma douce léthargie. En ouvrant les yeux, je scrutai, interdite, les murs de ma chambre d'adolescente, tapissés d'un paysage bucolique et répétitif. Je me redressai, me penchai, et allongeant le bras, je saisis sur le sol le masque aux longues tresses acheté la veille sur une brocante. Au calendrier mural, le feuillet du 3 juillet 1979 attendait d'être détaché. Je le jetai sur le lit et accrochai à sa place mon deuxième visage. Celui d'un être aimé. Je me levai et ouvris largement la fenêtre. Le soleil brillait déjà, le voisin en profitait pour tondre sa pelouse trop haute. Je respirai par une grande inspiration cette odeur d'herbe fraîchement coupée et descendis saluer Riquiqui, mon caniche blanc toujours affamé !

13 commentaires:

  1. Le (joli) songe d'une nuit d'été. ];-D

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  2. tu convoques tous les sens dans ce rêve somptueux et poétique...Emma

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    1. J'ai tenté de le faire...Merci Emma !

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  3. vegas sur sarthe9 mai 2019 à 16:15

    Je crois comprendre à ton rêve que les petits blancs n'ont aucune chance à tes yeux :)

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  4. Quelques moments aussi sensuels que torrides, dis donc !

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    1. Je me suis rendu compte qu'il peut y avoir plusieurs lectures, après avoir vu ton commentaire...

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  5. Très joli rêve... Ce masque devait être envoutant pour nourrir de tels songes ;-)

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    1. J'ai toujours aimé les masques d'indiens mais à l'époque, je n'avais pas de tels songes :) ! Merci Mapie !

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  6. C'est plein de poésie, j'aime beaucoup.

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