Voiture rouge
Point Mort… Tu te souviens quand tu étais tombée en panne ? J’étais à la pêche, du côté de ma rivière préférée. Au moment de repartir, tu ne voulais pas démarrer. Tu faisais des « tic, tic », comme ça, et tu refusais obstinément d’emballer ton moteur. Tu étais toute neuve, rouge flambante. Tu étais tellement étincelante. En arrivant, je t’avais cachée derrière un champ de maïs pour que tu ne fasses envie à personne. J’étais tellement perturbé par ton refus d’obtempérer à mes sollicitations de clé de contact que j’étais allé au village en face, sur la colline, avec mes lourdes cuissardes, pour trouver un garagiste complaisant. J’avais négligé mes baskets dans le coffre... J’avais pris un sérieux coup de chaud, ce jour-là. J’ai encore le bruit de tam-tam dans les oreilles, avec mon pas cadencé, sur ce goudron chaud des campagnes. Le mécano était arrivé avec ses pinces pour la batterie, et tu avais démarré de façon impeccable. Tu n’es plus jamais retombée en panne. Ceux qui avaient ri de cette mésaventure ne sont plus tous là aujourd’hui et toi, tu es toujours vaillante, un peu plus terne, un peu moins brillante mais présente. C’était, il y a vingt-quatre ans, déjà… J’avais une grande fierté de te conduire ; tu étais fringante, bien d’aplomb sur tes roues, et les formes de ta carrosserie étaient à la mode…
Point Mort… Tu te souviens quand tu étais tombée en panne ? J’étais à la pêche, du côté de ma rivière préférée. Au moment de repartir, tu ne voulais pas démarrer. Tu faisais des « tic, tic », comme ça, et tu refusais obstinément d’emballer ton moteur. Tu étais toute neuve, rouge flambante. Tu étais tellement étincelante. En arrivant, je t’avais cachée derrière un champ de maïs pour que tu ne fasses envie à personne. J’étais tellement perturbé par ton refus d’obtempérer à mes sollicitations de clé de contact que j’étais allé au village en face, sur la colline, avec mes lourdes cuissardes, pour trouver un garagiste complaisant. J’avais négligé mes baskets dans le coffre... J’avais pris un sérieux coup de chaud, ce jour-là. J’ai encore le bruit de tam-tam dans les oreilles, avec mon pas cadencé, sur ce goudron chaud des campagnes. Le mécano était arrivé avec ses pinces pour la batterie, et tu avais démarré de façon impeccable. Tu n’es plus jamais retombée en panne. Ceux qui avaient ri de cette mésaventure ne sont plus tous là aujourd’hui et toi, tu es toujours vaillante, un peu plus terne, un peu moins brillante mais présente. C’était, il y a vingt-quatre ans, déjà… J’avais une grande fierté de te conduire ; tu étais fringante, bien d’aplomb sur tes roues, et les formes de ta carrosserie étaient à la mode…
Première… Tu te souviens quand on montait au village de Saint Bardoux ? Mon père laissait ta place dans son garage, à l‘abri du froid et du soleil. On avait collé un écusson de la Drôme, à côté de la plaque d’immatriculation, à l’arrière, pour faire des similitudes rapprochantes avec sa voiture. J’avais l’impression que tu appartenais aux décors de nos collines. On fonçait, au petit matin, pour rejoindre les rivières. On faisait des rallyes ensemble pour que je sois le premier au bord de ma passion débordante. Tes phares éclaboussaient l’orée des forêts traversées. On éclairait des lièvres. Ils couraient devant nous, en faisant la course, et ils disparaissaient dans les talus. Pas une voiture ne nous résistait. Tu allais à la vitesse de mes pensées. C’était bien. Parfois, le temps d’un week-end, on arrivait au village dans un épais brouillard et les filles dormaient derrière, en toute quiétude. Tu ne m’as jamais trahi pendant tous ces voyages heureux de jeune famille…
Deuxième… Tu te souviens ? Je te vidangeais tous les cinq mille kilomètres et ton moteur tournait comme une horloge de précision, sans jamais faillir. Le filtre à air, c’était tous les dix mille. J’aimais bien te bricoler, démonter tes boulons les plus faciles et je t’entretenais avec une grande méticulosité. Je t’ai tellement souvent caressée avec des chiffons anti-poussière, des peaux de chamois et des brosses à reluire. Tu as grandi à l’huile de coude, avec mes révisions scrupuleuses de maniaque. Tes cent mille premiers kilomètres étaient une victoire facile. J’évitais les stationnements à risques, ceux qui marquent les portières avec d’autres portières moins regardantes sur la tôle peinte. Je te préservais des aléas de la méchanceté, des imbéciles et des jaloux, tout au long de notre route. On a changé tes pneus pour rouler en toute sécurité, par tous les temps et presque partout. On ne s’est jamais trop approchés de la neige. Je ne suis pas Vatanen…
Troisième… Tu te souviens ? On a fait des déménagements ensemble. Je couchais tes sièges à l’arrière pour l’espace, tu devenais alors une belle voiture commerciale avec plein de place. J’ai oublié le compte de tous les poids divers que tu as portés sans faiblesse. Tu étais sobre malgré mes dérapages. Ta constance était dans l’effort. Jamais un raté, jamais une pétarade de dérèglement dans tes courroies, tes soupapes, tes durites, jamais une crevaison sur le bas-côté avec le cric déplié et la roue de secours dégonflée, jamais une pierre sournoise dans le pare-brise pour l’étoiler à la fragilité du verre feuilleté. Tu évitais toutes les embûches, les clous pointus, les trous, les radars vicieux, les gendarmes moustachus. Je crois que tu étais une voiture porte-bonheur. Saint Christophe avait dû te baptiser sur ta chaîne de montage ou les ouvriers d’alors avaient encore l’orgueil du travail bien fait. Je peux les remercier tous…
Quatrième… Tu te souviens sur l’autoroute ? On filait le cent trente en douceur. Il suffisait que j’effleure la pédale d’accélérateur et tu fonçais en faisant mugir ton moteur. On s’accrochait derrière des voitures bien plus grosses. Elles nous mettaient dans le vent au bout d’un moment mais ils étaient impressionnés de nous voir collés dans leurs rétroviseurs de nantis. Les paysages défilaient à notre rythme effréné ou dans la lenteur paisible des promenades. Je ne doutais jamais de tes performances. J’avais une réelle confiance et je te conduisais,les yeux fermés… Le ronronnement de ton moteur était un chat, en pleine quiétude, sur les genoux d’un adepte fervent de la sieste…
Deuxième… Tu te souviens ? Je te vidangeais tous les cinq mille kilomètres et ton moteur tournait comme une horloge de précision, sans jamais faillir. Le filtre à air, c’était tous les dix mille. J’aimais bien te bricoler, démonter tes boulons les plus faciles et je t’entretenais avec une grande méticulosité. Je t’ai tellement souvent caressée avec des chiffons anti-poussière, des peaux de chamois et des brosses à reluire. Tu as grandi à l’huile de coude, avec mes révisions scrupuleuses de maniaque. Tes cent mille premiers kilomètres étaient une victoire facile. J’évitais les stationnements à risques, ceux qui marquent les portières avec d’autres portières moins regardantes sur la tôle peinte. Je te préservais des aléas de la méchanceté, des imbéciles et des jaloux, tout au long de notre route. On a changé tes pneus pour rouler en toute sécurité, par tous les temps et presque partout. On ne s’est jamais trop approchés de la neige. Je ne suis pas Vatanen…
Troisième… Tu te souviens ? On a fait des déménagements ensemble. Je couchais tes sièges à l’arrière pour l’espace, tu devenais alors une belle voiture commerciale avec plein de place. J’ai oublié le compte de tous les poids divers que tu as portés sans faiblesse. Tu étais sobre malgré mes dérapages. Ta constance était dans l’effort. Jamais un raté, jamais une pétarade de dérèglement dans tes courroies, tes soupapes, tes durites, jamais une crevaison sur le bas-côté avec le cric déplié et la roue de secours dégonflée, jamais une pierre sournoise dans le pare-brise pour l’étoiler à la fragilité du verre feuilleté. Tu évitais toutes les embûches, les clous pointus, les trous, les radars vicieux, les gendarmes moustachus. Je crois que tu étais une voiture porte-bonheur. Saint Christophe avait dû te baptiser sur ta chaîne de montage ou les ouvriers d’alors avaient encore l’orgueil du travail bien fait. Je peux les remercier tous…
Quatrième… Tu te souviens sur l’autoroute ? On filait le cent trente en douceur. Il suffisait que j’effleure la pédale d’accélérateur et tu fonçais en faisant mugir ton moteur. On s’accrochait derrière des voitures bien plus grosses. Elles nous mettaient dans le vent au bout d’un moment mais ils étaient impressionnés de nous voir collés dans leurs rétroviseurs de nantis. Les paysages défilaient à notre rythme effréné ou dans la lenteur paisible des promenades. Je ne doutais jamais de tes performances. J’avais une réelle confiance et je te conduisais,les yeux fermés… Le ronronnement de ton moteur était un chat, en pleine quiétude, sur les genoux d’un adepte fervent de la sieste…
Cinquième… Tu te souviens ? Deux cent mille kilomètres au compteur et pas une égratignure, pas le moindre tonneau… ni même une bousculade dans un ravin, pas d’explosion de ton moteur, pas de survirage ou de chavirage dans les tournants. Je crois que tu m’impressionnais et je ne m’en rendais pas encore vraiment compte. Je regardais le compteur kilométrique comme une victoire sur le temps. Je vantais tes talents et je louais tes reprises sans fléchissement. Tu étais un plaisir à conduire sur nos routes, toujours partante, toujours avenante, toujours bien gonflée, toujours à l’heure…
Quatrième… Tu te souviens ? Bien sûr, le tissu des banquettes avait terni, le tableau de bord s’était déformé à cause de toutes ces chaleurs brûlantes de derrière le pare-brise. On n’avait pas pu éviter toutes les portières ennemies et un abruti avait marqué la peinture de ton coffre avec sa clé vicieuse pour nous montrer sa désapprobation à cause d’une place de parking. Si j’avais pu le tenir, celui-là… On avait perdu un enjoliveur et nous avions fait les casses pour te retrouver le semblable. J’avais passé un lustrant et tu avais repris des couleurs. Je surveillais ton niveau d’huile et tu perdais un peu d’eau mais j’étais toujours près de toi. J’avais changé les tapis de sol et j’avais passé l’aspirateur, une fois de plus, dans tous tes recoins. Les contrôles techniques étaient, pour toi, une simple formalité. On a changé tes ampoules car il fallait des blanches pour se mettre à l’Europe et à toutes ses absurdités. On craignait les PV, nous aussi... Fidèle compagne assidue, tu avais toujours autant d’allant dans nos déplacements, je pouvais compter sur toi et tu démarrais toujours au quart de tour, toujours prête pour l’aventure et pour mes excès. Tu as dû me sauver la vie plusieurs fois sans que je m’en rende compte. Tu récupérais mes trajectoires défaillantes à cause de mes brouillards, de mes cafards, de mes histoires…
Troisième… Tu te souviens quand on est partis à Lyon ? J’avais pris deux collègues du travail et on allait faire un stage. Tu n’as même pas toussé, tout le long du trajet, un vrai métronome. Je tenais le cent quarante mais il fallait presque crier pour s’entendre parler. En y pensant, je ne t’ai jamais installé de poste de radio. A cette époque ancienne, je chantais tout le temps. On avait fait une performance. Si tu savais comme j’étais fier de toi. Mes deux potes te regardaient avec jalousie. Ils t’estimaient d’une haute valeur et pourtant, tu devenais doucement une voiture de collection. Tes amortisseurs s’étaient un peu affaissés, tu perdais un peu d’huile, la lumière du plafonnier était muette d’éclairage, le levier de vitesses était un peu fou et il fallait se rappeler le bon emplacement pour passer le bon rapport, au bon moment. Tu devenais folklorique. Tu sais ? C’est avec toi que j’ai arrêté de fumer. Jamais un mégot dans ton cendrier, tu ne méritais pas ma fumée. Cela fait vingt quatre ans que je vis sans tabac. C’est mon record. Avec toi, j’allais d’exploits en exploits. Quand j’avais pris l’envie du bout du monde, je suis sûr que tu m’aurais emporté avec autant de dynamisme qu’à nos débuts. Tu n’avais que vingt ans…
Deuxième… Tu te souviens ? On avait oublié de fêter tes trois cent mille kilomètres et quand j’ai vu le « un » s’afficher dans le compteur, j’ai compris que tu avais tourné une troisième fois. C’était étrange ; je peux te l’avouer aujourd’hui. J’attendais que tu tombes en panne. Tu sais ? Je t’aurais pardonné si facilement. Mais jamais, jamais, je ne t’aurais laissée sur le bord de la route. Nous avons partagé tellement de souvenirs, tous les deux. Les bons et les mauvais, ceux qui font une vie. Nous allions sous les rouleaux et tu te baignais dans la fraîcheur des centres de lavage automobile. Je te savonnais encore, par habitude, et pour le simple plaisir de caresser ta tôle ondulante rouge fané. Je t’ai donnée à un pauvre gars sans voiture parce qu’il était dans la misère. Je pensais que je faisais une bonne action et tu pouvais encore porter sa famille un long moment. Puis, je t’ai récupérée. Tu étais dans un sale état. Il t’avait massacrée, inconscient de ta bonne santé. Les gens sont cons. Ils détruisent les cadeaux et entretiennent mal ce qu’ils paient. Mais tu étais toujours vaillante et toujours aussi solide. La trotteuse de ton heure se mettait en vacances parfois. J’ai pris un garage couvert pour te protéger du froid.
Quatrième… Tu te souviens ? Bien sûr, le tissu des banquettes avait terni, le tableau de bord s’était déformé à cause de toutes ces chaleurs brûlantes de derrière le pare-brise. On n’avait pas pu éviter toutes les portières ennemies et un abruti avait marqué la peinture de ton coffre avec sa clé vicieuse pour nous montrer sa désapprobation à cause d’une place de parking. Si j’avais pu le tenir, celui-là… On avait perdu un enjoliveur et nous avions fait les casses pour te retrouver le semblable. J’avais passé un lustrant et tu avais repris des couleurs. Je surveillais ton niveau d’huile et tu perdais un peu d’eau mais j’étais toujours près de toi. J’avais changé les tapis de sol et j’avais passé l’aspirateur, une fois de plus, dans tous tes recoins. Les contrôles techniques étaient, pour toi, une simple formalité. On a changé tes ampoules car il fallait des blanches pour se mettre à l’Europe et à toutes ses absurdités. On craignait les PV, nous aussi... Fidèle compagne assidue, tu avais toujours autant d’allant dans nos déplacements, je pouvais compter sur toi et tu démarrais toujours au quart de tour, toujours prête pour l’aventure et pour mes excès. Tu as dû me sauver la vie plusieurs fois sans que je m’en rende compte. Tu récupérais mes trajectoires défaillantes à cause de mes brouillards, de mes cafards, de mes histoires…
Troisième… Tu te souviens quand on est partis à Lyon ? J’avais pris deux collègues du travail et on allait faire un stage. Tu n’as même pas toussé, tout le long du trajet, un vrai métronome. Je tenais le cent quarante mais il fallait presque crier pour s’entendre parler. En y pensant, je ne t’ai jamais installé de poste de radio. A cette époque ancienne, je chantais tout le temps. On avait fait une performance. Si tu savais comme j’étais fier de toi. Mes deux potes te regardaient avec jalousie. Ils t’estimaient d’une haute valeur et pourtant, tu devenais doucement une voiture de collection. Tes amortisseurs s’étaient un peu affaissés, tu perdais un peu d’huile, la lumière du plafonnier était muette d’éclairage, le levier de vitesses était un peu fou et il fallait se rappeler le bon emplacement pour passer le bon rapport, au bon moment. Tu devenais folklorique. Tu sais ? C’est avec toi que j’ai arrêté de fumer. Jamais un mégot dans ton cendrier, tu ne méritais pas ma fumée. Cela fait vingt quatre ans que je vis sans tabac. C’est mon record. Avec toi, j’allais d’exploits en exploits. Quand j’avais pris l’envie du bout du monde, je suis sûr que tu m’aurais emporté avec autant de dynamisme qu’à nos débuts. Tu n’avais que vingt ans…
Deuxième… Tu te souviens ? On avait oublié de fêter tes trois cent mille kilomètres et quand j’ai vu le « un » s’afficher dans le compteur, j’ai compris que tu avais tourné une troisième fois. C’était étrange ; je peux te l’avouer aujourd’hui. J’attendais que tu tombes en panne. Tu sais ? Je t’aurais pardonné si facilement. Mais jamais, jamais, je ne t’aurais laissée sur le bord de la route. Nous avons partagé tellement de souvenirs, tous les deux. Les bons et les mauvais, ceux qui font une vie. Nous allions sous les rouleaux et tu te baignais dans la fraîcheur des centres de lavage automobile. Je te savonnais encore, par habitude, et pour le simple plaisir de caresser ta tôle ondulante rouge fané. Je t’ai donnée à un pauvre gars sans voiture parce qu’il était dans la misère. Je pensais que je faisais une bonne action et tu pouvais encore porter sa famille un long moment. Puis, je t’ai récupérée. Tu étais dans un sale état. Il t’avait massacrée, inconscient de ta bonne santé. Les gens sont cons. Ils détruisent les cadeaux et entretiennent mal ce qu’ils paient. Mais tu étais toujours vaillante et toujours aussi solide. La trotteuse de ton heure se mettait en vacances parfois. J’ai pris un garage couvert pour te protéger du froid.
Première… Tu te souviens ? Le nombre de jolies femmes qui se sont assises à côté de moi ? Celles qui avaient des petits rires de demoiselle et des envies mordantes de tigresse, celles avec des sourires de communiantes et des pêchés d’Enfer plein la tête ? Remarque, ce sont celles que je préférais. Tu trouvais toujours les bons bosquets dans l’intimité de nos rendez-vous secrets. On en a fait des kilomètres pour rejoindre ces Belles. Tu te rappelles l’embardée qu’on avait faite ? Nous avions exécuté un superbe tête-à-queue, j’allais trop vite et c’était mouillé. Les rencontres galantes ont toujours été des accélérateurs naturels. J’avais pressé la pédale de frein et j’étais tétanisé dessus. J’ai vu, au ralenti, le camion qui arrivait en face, le ravin, le champ d’à côté et je suis reparti par là où j’étais arrivé. C’était un miracle sans une bosse et sans te cabosser. Qu’est-ce que j’ai pu rire avec toi…
Point mort… C’est moi qui me souviens de tout parce qu’il reste du sable, quelques cheveux de femme, quelques poils de chien et de chat aussi… Il y a encore des dessins d’enfants dans le vide-poche, des petites pierres et des coquillages ramassés sur la plage, quelques cartes de restaurant, des jetons de caddy, des joints de vidange... Tu affiches trois cent quarante cinq mille kilomètres au compteur et je viens de t’échanger contre une voiture neuve. J’ai eu l’impression que tes phares me suivaient quand je suis entré dans la concession griffue. Je n’osais pas te regarder. Je t’ai lâchement abandonnée sur ce parking de vieilles ferrailles. Ils voulaient ta carte grise et tu vas partir à la casse. Si tu savais comme j’ai honte. Je ne suis pas digne de la confiance que tu m’as donnée pendant vingt-quatre ans, sans jamais défaillir. Tu avais même remis ta trotteuse en marche pour m’indiquer la bonne heure. Tu sais ? Si j’avais pu, je t’aurais gardée encore mille ans. Si j’avais eu un jardin, je t’aurais fait une belle place et tu aurais rouillé en douceur, avec les saisons pour changer lentement ta couleur. Maintenant, ils vont compresser, concasser, recycler, détruire nos souvenirs en commun. Pourtant, jamais tu ne m’as fait défaut, jamais une traîtrise, jamais une embardée. Tu vas me manquer dans ta belle robe rouge. Je t’abandonne à la ferraille, excuse-moi, pardonne-moi, ne m’en veux pas...
Maintenant, tu es seule dans le froid et la pluie, tu dois avoir peur. Tu sais ? Je ne leur ai donné qu’une de tes deux clés et ce soir, je viendrai te voler, pour te reprendre. On s’en ira tous les deux, comme avant, avec le paysage du pare-brise comme seul futur envisageable. Et si tu manques d’essence, je t’offrirai les miens… Adieu ma vieille Voiture Rouge… tu me manques déjà…
Point mort… C’est moi qui me souviens de tout parce qu’il reste du sable, quelques cheveux de femme, quelques poils de chien et de chat aussi… Il y a encore des dessins d’enfants dans le vide-poche, des petites pierres et des coquillages ramassés sur la plage, quelques cartes de restaurant, des jetons de caddy, des joints de vidange... Tu affiches trois cent quarante cinq mille kilomètres au compteur et je viens de t’échanger contre une voiture neuve. J’ai eu l’impression que tes phares me suivaient quand je suis entré dans la concession griffue. Je n’osais pas te regarder. Je t’ai lâchement abandonnée sur ce parking de vieilles ferrailles. Ils voulaient ta carte grise et tu vas partir à la casse. Si tu savais comme j’ai honte. Je ne suis pas digne de la confiance que tu m’as donnée pendant vingt-quatre ans, sans jamais défaillir. Tu avais même remis ta trotteuse en marche pour m’indiquer la bonne heure. Tu sais ? Si j’avais pu, je t’aurais gardée encore mille ans. Si j’avais eu un jardin, je t’aurais fait une belle place et tu aurais rouillé en douceur, avec les saisons pour changer lentement ta couleur. Maintenant, ils vont compresser, concasser, recycler, détruire nos souvenirs en commun. Pourtant, jamais tu ne m’as fait défaut, jamais une traîtrise, jamais une embardée. Tu vas me manquer dans ta belle robe rouge. Je t’abandonne à la ferraille, excuse-moi, pardonne-moi, ne m’en veux pas...
Maintenant, tu es seule dans le froid et la pluie, tu dois avoir peur. Tu sais ? Je ne leur ai donné qu’une de tes deux clés et ce soir, je viendrai te voler, pour te reprendre. On s’en ira tous les deux, comme avant, avec le paysage du pare-brise comme seul futur envisageable. Et si tu manques d’essence, je t’offrirai les miens… Adieu ma vieille Voiture Rouge… tu me manques déjà…
un beau récit que voilà, avec un compte, et un décompte telle la montée en vitesse, puis la décélération :)
RépondreSupprimerun bel attachement à une voiture sans faille !
il est vrai qu'il y a du vécu et des souvenirs lorsqu'une voiture telle que celle-ci nous accompagne loin au compteur
ça me rappelle la première golf de mon mari : 350000kms au compteur, ayant fait son office même après avoir été retrouvée après un vol à la Sainte Baume...
Et bé ! Une belle histoire d'amour. Je n'avais pas non plus d'auto radio dans mes voitures, mais je chantais aussi, juste peut-être pas... Mais fort ! ];-D
RépondreSupprimerQuand je disais que les voitures inspiraient de l'amour aux impromptus... tu en fais une belle illustration, Pascal !
RépondreSupprimerUn joli récit de vie et d'amour en quelques rapports...
RépondreSupprimer:)
SupprimerBravo Pascal, un récit fort raconté, souvenirs et belles demoiselles :)
RépondreSupprimerComme c'est beau, cette amitié d'un homme pour sa vieille bagnole...
RépondreSupprimerUne compagne de vie, qui a vu toutes ses vicissitudes, ses espoirs, ses joies, ses grands bonheurs.
Judicieuse présentation en forme de levier de vitesse. ;-)
¸¸.•*¨*• ☆
Moi aussi, j'ai aimé ta façon d'écrire ce texte plein de reconnaissance pour ta vieille compagne. C'est bien connu : les hommes préfèrent souvent leur voiture à leur femme...Je sors !
RépondreSupprimerÇa dépend l'âge de la... voiture... ;)
SupprimerCa y est ! On a retrouvé "L'homme à la voiture rouge" de Radio Luxembourg !
RépondreSupprimerhttps://www.le-rayon-populaire.com/files/23946bis.jpg
Qu'est-ce qu'il écrit bien, le bougre ! ;-)