« Quand on allait chez Daniel, à la sortie des 
cours » , le mardi et le vendredi, nous galopions le long du chemin de terre 
revêtus de nos culottes courtes, nos bérets et nos vestes bleu marine. Nous 
arrivions essoufflés,  les joues 
rouges dans la grande maison en pierre et nos déposions nos cartables dans 
l’entrée, nous nous déchaussions et nous nous précipitions sur les larges 
tartines de pain frais de confiture de framboises celles-là même que nous 
allions cueillir dans les bois ; parfois nous trouvions aussi des tranches de 
pain beurrées saupoudrées de chocolat râpé. J’en ai encore l’eau à la bouche : 
des goûters simples et qui nous paraissaient somptueux.
Daniel, c’était notre ancien instituteur, 
celui qui nous avait appris à lire à écrire à la plume et l’encre qui nous 
tachait les doigts. Il avait passé toute sa carrière dans notre village, pris sa 
retraite deux ans auparavant et avait enseigné nos parents ; C’est dire si nous 
le respections et que nous avions bien du mal à ne plus l’appeler Maître mais 
Daniel ! Son bonheur de nous recevoir, nous ces dernier élèves, ceux que 
Mademoiselle Anna, toute jeune institutrice avaient « pris en main ».
Nous étions quatre gaillards dans la classe du 
certif’, quatre gentils rebelles et après avoir « bâclé » nos devoirs, nous 
faisions de la musique.  D’abord du 
chant choral avec Daniel au piano puis nous prenions nos instruments qu’ils 
gardaient précieusement les autres jours de la semaine, nous les caressions, 
nous leur parlions… Charles et Jacky au violon, Lucien à la flûte et moi au 
violoncelle. Daniel choisissait les partitions et nous commencions notre 
quintette dans une joyeuse harmonie pas toujours très symphonique.
Puis ce fut le collège, le lycée pour Lucien 
et moi et les répétitions se firent de plus en plus rares puis cessèrent 
complètement. 
Aujourd’hui en écoutant cette sonate pour 
violoncelle et piano de Rachmaninov, je me souviens de mon premier concert 
soliste. La  présence au premier 
rang de Maître Daniel m’avait profondément ému et réjoui, et plus encore surtout 
lorsque me prenant dans ses bras, la larme à l’œil,  il m’avait glissé subrepticement dans la 
poche de mon veston un pot de gelée de framboise.
ton récit m'a rappelé "La petite fugue" de Maxime Le Forestier : https://www.youtube.com/watch?v=RvIp3_RWjx4
RépondreSupprimerJ'ai cru un instant que tout ça était du pipeau, mais c'est trop criant de vérité :)
RépondreSupprimerSi tu lui dois d'être parvenue jusqu'ici [ https://lilousoleil.wordpress.com/2015/01/15/ici/ ], je comprends tout ! ;)
RépondreSupprimerj'ai aussi pensé à Maxime et je trouve ce souvenir formidable de vie, de tendresse ... et puis Daniel ... :o))
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