mercredi 2 décembre 2015

Clémence - Nos profs

Mademoiselle Louise.

Je me retournai, je la vis.
Toujours aussi belle.
En un regard, j'étais redevenue « la petite ».

Ma première rencontre avec elle fut épique et fit monter le rouge aux joues de ma mère.
Septembre, j'avais trois ans moins deux mois. Ma mère me conduisit à l'école maternelle.
Ainsi, ce serait elle, ma maîtresse ! Qu'est-ce qu'elle est belle !
Ma mère discutait avec elle. Et puis… la chute fut rude. Comment cela ? Elle ne voulait pas de moi.
Petits poings serrés sur les hanches, je lui assénai :
- Mais je suis propre et je sais parler !
Je n'avais pas les trois ans accomplis. Je devais attendre la deuxième rentrée de l'année, au printemps.

Ce fut un ravissement continu dans une classe aux grandes baies ouvertes sur un verger où une quarantaine d'enfants apprenaient à grandir ensemble.
J'étais assise dans la rangée des moyens. Je dessinais, je peignais, je découpais et « picotais » avec application.
J'enfilais, j'assemblais, je crochetais des longueurs incalculables de fils de perles ou de crochets en S ou en G…
J'écoutais avec ravissement les histoires et les contes.
J'apprenais des chansons et récitais par cœur des poèmes.
Deux choses que j'aimais par-dessus tout !
Le cinéma  : un rouleau de papier peint,  posé sur un chevalet et  le défilement de l'histoire en images.
Et…. « les graines de sagesse » : de minuscules perles de sucre coloré dans un bocal. Nous les captions en plongeant un  doigt mouillé de salive ….
Elle avait de l'imagination et le pouvoir des fées, mon institutrice.

Elle m'a aussi  appris à partager, à aider et à accepter de l'aide,  à regarder et pas seulement voir, à écouter et pas seulement entendre, à prévoir, à anticiper, à vivre ensemble. Oui, elle m'a appris tout cela !

Et puis vint le jour où je quittai l'école maternelle pour la grande école.  De temps à autre, je m'échappais et j'allais lui confier mes joies, dont celle de savoir lire et mes petits chagrins. Non, c'était plutôt un gros chagrin. A la grande école, on ne m'appelait plus par mon diminutif, mais par ma nationalité….

Un jour, je ne la vis plus à l'école. Elle avait dû donner sa démission pour  pouvoir se marier.
Je trouvais cette loi injuste, mais c'était ainsi en ce temps-là.

A mon tour, je devins maîtresse. Un choix, un devoir de transmission, mais aussi un hommage.

J'avais vingt-deux  ans. C'était en juin. La fête scolaire battait son plein. J'étais dans ma classe pour présenter les  merveilles de mes petits élèves…

Je me retournai. Je la vis.
Toujours aussi belle.
Mes premières paroles furent : Merci, Mademoiselle Louise.

14 commentaires:

  1. Bof,madame Fumeron mon instite était une vieille vache qui n'aimait pas les gosses '(elle n'en navait pas à elle non plus),elle était crés crés méchante et moi je préfèrais faire semblant d'écrire sur mon cahier sur le bureau (avec le trou pour l'encrier,à l"anciènne).En vérité je me marrais intérieurement en regardant les images de pif le chien et son copain hercule sur mes genoux !
    C'est p't'être pour ça qu'on m'a envoyer travailler à l'usine vers l'âge de douze...un vrai nul que j'étais à l'école ! ;o)))

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    1. Ce que tu soulignes avec un brin d'ironie au du vrai. Dans ce "cosme," il y a d'étranges molécules qui se baladent et cela donne parfois des soupes étranges....savoureuses ou amères.....

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  2. quels beaux et tendres souvenirs de ta douce enfance ! picoter, bien sûr qu'on picotait autrefois, des lustres que je n'avais pas "entendu " ce mot, merci, Clémence

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    1. Merci Emma ! Et c'est vrai que "mon" école maternelle fut probablement la plus belle dans ma scolarité...
      Ce "picotage" existe encore, bien que souvent décrié !

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  3. L'Arpenteur d'étoiles3 décembre 2015 à 13:50

    un véritable beau souvenir d'enfance et un portrait de mademoiselle Louise plein de tendresse ... certaine maîtresse d'école sont de véritables soleils qui nous éclairent pour toujours

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  4. Ces souvenirs d'école sont toujours remplis d'une grande nostalgie; c'est celle de notre jeunesse.

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  5. J'aime cette image de "soleil",..."Solaire" dit-on même ....

    Je viens de retrouver ma photo de classe...

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    1. L'Arpenteur d'étoiles3 décembre 2015 à 18:04

      tu pourrais nous la proposer pour illustrer ton texte ... si tu le veux bien sur !

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    2. Bien sûr... juste le temps de le faire !

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    3. Ah... voilà que je fais doublon... mon pseudo (Clémence) et mon prénom ... Voilà, vous en savez encore un peu plus !!!

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  6. L'Arpenteur d'étoiles4 décembre 2015 à 22:23

    et du coup, t'es où sur la photo ? .... mais tu peux ne pas répondre bien évidemment :o))

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  7. C'est très joli, rempli d'une belle nostalgie et de doux sentiments. Je vous envie d'avoir cette mémoire-là.

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  8. Je peux !
    En bas à droite, debout, derrière la petite fille assise avec une robe foncée...mais je te jure, j'ai drôlement changé depuis ;)

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