Dès qu’il arrivait à la maison, il se changeait. Aux pieds, il enfilait des Air Max qui coûtent un bras, sur les fesses, un short, en haut un vieux tee-shirt un peu troué sur l’épaule à cause des nombreux lavages et roule. Enfin plutôt cours ! Il sortait du jardin et il empruntait le petit sentier vers le fleuve. Ouf ouf les premiers pas étaient en descente, une bonne centaine de mètres par l’escalier ouf ouf ça passait tout seul juste un peu les genoux douloureux mais ça avançait vite ouf ouf sur la berge, il tournait à gauche jusqu’au pont, la partie la moins agréable du parcours puisqu’il était obligé de courir ouf ouf sur le trottoir dans l’odeur des échappements des voitures. Il passait le premier pont et ouf ouf sur la promenade de l’autre côté. Là une ligne droite de deux bons kilos ouf ouf qu’il avalait à s’en brûler les cuisses et les poumons. Il se faisait mal aux jambes pour ne pas avoir mal tout court. Tous les soirs ouf ouf depuis qu’elle lui avait dit j’en ai marre, je veux autre chose. Autre chose ? Ouf ouf mais quoi ? Tu veux partir ? J’y pense ouf ouf j’y pense… Il avait encaissé et depuis cette annonce, quand il rentrait il courait une heure, une heure entière à fond, à bloc ouf ouf pour se calmer pour se vider de la colère qui l’avait agrippé, qui lui serrait le cœur ouf ouf il savait qu’elle en était capable, qu’elle était fichu de le faire il en avait peur alors il courait pour ouf ouf éloigner cette perspective. La ligne droite engloutie, il passait sur l’autre pont ouf ouf il était rouge en nage les yeux cernés les épaules lourdes comme des cuisses ouf ouf il passait sur la rive et accélérait encore de plus belle en profitant ouf ouf de la descente du pont. Dix ans qu’ils étaient ensemble, dix années et très peu de nuages entre eux à part ce gros orage ouf ouf elle en avait eu marre d’un coup il n’avait rien vu venir ouf ouf alors il courait pour s’oublier, pour s’exténuer, pour se détruire. Il arrivait maintenant devant les escaliers qui remontent ouf ouf à la maison, il était maculé de sueur et de boue, les traits creusés ouf ouf et il s’enflait les cent marches le plus vite possible pour se vider du peu de forces qui lui restait ouf ouf Arrivé en haut, devant chez eux, il soufflait comme une usine de forge, il se courbait en deux les mains sur les genoux, il était mort, vidé, sans force, anéanti.
Leur amour était à bout de souffle. Lui avec.
Leur amour était à bout de souffle. Lui avec.
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10 ans d'amour et l'orage qui éteint tout ...
RépondreSupprimeret cet homme sportif qui est à bout de souffle et l'amour avec ... dur, dur ...
Il ferait mieux de courir après une bouteille de Lagavulin !
RépondreSupprimerPfuuuu ton texte m'a essoufflé tiens, tchin tchin ];-D
Et puis tu sais ce qu'on dit : Dix de perdues, une de retrouvée !
J'ai bien couru avec toi... enfin... ouf ouf... derrière toi.
RépondreSupprimerJe crois que je vais repartir sur la pointe des pieds
@ L'Arpenteur, Andiamo et Vegas : Ouf ouf merci de m'avoir lu! :-)
RépondreSupprimerJ'aime bien cette balade de forcené, cette fuite en avant; tu as fait court mais il y aurait tellement de choses à dire.
RépondreSupprimer@ Pascal Dupont Merci!
RépondreSupprimerJ'ai fait court parce que c'est le jeu, le format, aussi.
Plus long n'est pas lu. On pourrait écrire un livre en marathonant. :-)
Je lis tout, politesse oblige, et souvent qua nd je ne mets pas de commentaires, c'est trop tronqué. :)
SupprimerUne écriture en apnée qui donne le vertige !
RépondreSupprimerc'est fort bien fait.
¸¸.•*¨*• ☆
Merci Célestine, c'était l'intention!
Supprimer... ou les amours de Zatopek, au tragique destin
RépondreSupprimerEmil courait pour d'autres raisons et plus vite encore! :-)
SupprimerJe n'ai pas du valider ma réponse, j'écrivais que j'avais bien lu votre texte et l'avais compris aussi bien qu'il m'est possible. Et que, par libre association, j'avais pensé à "Courir" de Echenoz, à propos de ce coureur formidable qui n'aimait pas tant que ça courir et finit sa vie, après qu'on l'eût séparé de sa femme, par balayer les rues de Prague. Ce qui n'a, j'en conviens, aucun rapport avec votre texte !
SupprimerJe crois que vous avez vraiment senti ce que j'ai voulu dire! Merci à vous.
Supprimeret s'il essayait à présent de l'exprimer autrement cette colère qui semble ne pas arriver à se vider malgré les "ouf ouf" ?
RépondreSupprimerPeindre? Ah non je suis bête, écrire? :-)
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