La poudre
aux yeux …
Cela fait belle lurette qu’Hortense ne croit plus au Père Noël
…
Mais pourtant, chaque 24 décembre au soir, elle pose ses
pantoufles devant la cheminée et chaque 25 décembre au matin, elle s’avance
calmement pour voir si cette année encore, la magie de Noël aura opéré.
Et, en ce 25 décembre de sa 99ème année, Hortense,
contre toute attente, aperçoit dans sa pantoufle posée au pied de la cheminée
de marbre, un tout petit flacon en cristal qui dépasse du rebord en fourrure
d’un chausson.
Oh ! Que c’est mignon !
Quelle merveille, se dit-elle !
Son cœur bat à toute allure, comme chaque année.
Sentiment de joie et d’intrigue, de curiosité et de paix.
Elle se penche lentement pour attraper le précieux objet.
Le flacon est magnifiquement ciselé, orné d’un motif
représentant un cœur et une colombe.
A l’intérieur elle voit de la poudre rose pâle, comme le sont
ses joues flétries et le dessus de ses paupières qui voient la vie rose-pastel.
Elle pense que c’est peut-être de la biberine et a envie d’y
goûter mais elle se dit aussitôt qu’elle a vraiment passé l’âge de cette
sucrerie enfantine !
Elle se dit ensuite que c’est peut-être du sable fin que lui
envoie un vieux marin solitaire venu d’une île lointaine et inconnue mais elle
se reprend aussitôt : cela fait si longtemps qu’elle n’a pas mimé les
sirènes dans les flots !
Elle a soudain une pensée affolée : et si le flacon
contenait de la poudre de Perlimpimpin, un poison, un poison à inhaler dès que
le bouchon sauterait ?
Mais qui pourrait souhaiter l’empoisonner ?
Elle ne connait aucun ennemi et son entourage est bienveillant
…
Hortense pose le minuscule flacon sur le rebord de la
cheminée, s’assoit dans son fauteuil à bascule
et contemple les braises qui, comme elle, sont entrain de s’éteindre.
Sur la table basse, une
flûte en cristal lui fait des clins d’œil.
Elle sourit !
Depuis quelques mois, elle aime beaucoup buller, c’est vrai,
en passant en revue tous les délicieux souvenirs d’antan…
Ah ! Ce Père Noël, il sait vraiment y faire pour nous
empoisonner l’existence se dit-elle, ne sachant pas encore qui elle pourra
bien remercier cette année pour ce petit
cadeau discret.
La vie finalement, c’est de la poudre aux yeux !
La raison est poison pense-t-elle.
Hortense joint les mains l’une contre l’autre et inspire.
Il y a dans la pièce une douce présence qui sent bon.
Qu'importe le flacon pourvu qu'on ait la vieillesse... ];-D
RépondreSupprimerOn n'ose souhaiter longue vie à Hortense qui semble s'émerveiller comme à son premier Noël ...
RépondreSupprimerJe pencherais quand même pour le vieux marin...
RépondreSupprimerquel joli cadeau qui fait voyager ainsi l'imagination et la remémoration :)
RépondreSupprimerc'est un doux poison
Une très belle ambiance que tu nous diffuses là :-)
RépondreSupprimerUn texte délicat comme le flacon offert à Hortense. J'ai beaucoup aimé cette douceur nostalgique Annick.
RépondreSupprimerComme c'est joli. " La vie finalement c'est de la poudre aux yeux!" ;-)
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