Oh oui, ils existent pour moi les plaisirs minuscules ! Ce sont des petits bonheurs souvent journaliers que je déguste par avance avec gourmandise parce que je sais qu'ils m'attendent, qu'ils sont là pour moi. Ces moments légers, comme volés au temps qui passe me font aimer la vie.
Il en est un, particulièrement que je ne manquerais pour rien au monde. Entamer la journée en hiver en sachant que ma petite visiteuse au joli plumage viendra me tenir compagnie quelques minutes me comble de joie. J'ouvre les volets de la cuisine et comme si elle n'espérait que cela, la voilà qui se pose sur le rebord de la fenêtre. Mais elle vous racontera mieux que moi notre conversation muette. Enfin, c'est surtout elle qui s'exprime. Moi, je me contente de l'admirer.
"Je te vois derrière ton rideau. Tu m'observes. Nous ne vivons pas dans le même monde toi et moi. Alors que je grelotte dans la froidure, tu te serres dans ta robe de chambre confortable. A toi, la cuisine bien chauffée; à moi, la terrasse où les petites stalactites de cristal s'accrochent à la balustrade. Tes doigts s'enroulent autour de ta tasse fumante et tu souris. Tu sembles ravie de me voir chaque matin. Moi aussi, j'aime bien te rendre visite. Tu ne manques pas de déposer des graines, une noisette de beurre dans ma soucoupe bleue. J'apprécie tes attentions délicates et je fais honneur à mon petit déjeuner. Tu sais cependant qu'il ne faut pas m'effaroucher et que, mine de rien, je garde quand même un œil sur toi. Et moi, pour la peine, je te laisse admirer tout ton saoul mon plumage blanc, jaune et noir et écouter mes pépiements.
Ici, je suis tranquille. Nous avons appris à nous connaître toi et moi. Tu as placé, dans le coin le plus reculé de ta terrasse une vieille souche. Je te remercie d'avoir construit pour moi, dans son creux, un nid de coton sûrement très confortable. Ne m'en veux pas si je le délaisse mais je m'ennuierais dans ton cocon. Et puis, ce morceau de bois douillettement garni serait une entrave à ma liberté. Je préfère partager le roncier du champ d'à côté avec les miens. Blottis les uns contre les autres, le froid ne nous atteint pas.
Je me languis quand même du printemps et des feuilles tendres de ton poirier. J'ai hâte d'y déposer mes œufs dans le foin et les brindilles, comme l'an passé. Je te promets de chanter pour toi et nous oublierons les frimas jusqu'à l'année prochaine."
Ces derniers matins ma mésange charbonnière ne s'attarde plus beaucoup. Je la sens fébrile. Elle ne cesse d'aller et venir. Ces quelques jours de soleil ont réveillé la nature et avec elle, les instincts des oiseaux. Ma protégée se cherche déjà un amoureux. Bientôt, trop occupée avec sa nouvelle famille, elle désertera ma fenêtre mais elle n'oubliera pas sa promesse : le jardin retentira de son chant et je pourrai admirer le premier envol maladroit de ses petits.
Il est d'autres menus plaisirs qui m'émerveillent : aller au jardin et m'étonner devant l'éclosion des bourgeons jour après jour. Prendre un chemin, seule dans la forêt. Écouter les frôlements, les bruissements des insectes, le gazouillis des oiseaux, les galops des animaux. Écouter l'eau de la rivière qui court en chantant sur les galets. Écouter le vent qui agite le sommet des peupliers. Écouter, en automne le froissement des feuilles que je foule. Débusquer derrière la fougère un cèpe odorant. Se laisser submerger par le silence, les odeurs, les couleurs de tout ce qui m'entoure. Observer les changements imperceptibles de la nature au fil des saisons. Tout cela m'émeut, me procure des bouffées de bonheur dont je ne saurais me passer. Ce sont mes essentiels. Une soif de délices toujours au rendez-vous et qui ne s'étanche pas.
Je ne vous surprendrai pas en vous disant qu'un autre de mes petits plaisirs favoris est d'ouvrir un recueil de Philippe Delerm. Tous ses écrits me donnent du baume au cœur. Personne ne sait comme lui peindre la vie, les moments de vie par petites touches avec une délicatesse infinie. Merci Monsieur Delerm.
Je partage avec toi le petit plaisir inlassable de la compagnie des oiseaux
RépondreSupprimerAutrefois beaucoup d'oiseaux dans mon jardinet, maintenant ils se font rares.
RépondreSupprimerPour faire de la place au tramway, de nombreuses maisons ont été rasées, avec elles ont disparu les jardinets, les arbres et les buissons... La rançon de "progrès" ! ];-D
J'ai toujours eu mangeoires et nichoirs dans mon jardin, et je partage tes plaisirs si bien contés.
RépondreSupprimerEt j'ai lu aussi quelques bouquins de Delerm, poésie en prose et romans.
Le rouge-gorge a cessé son tic-tic et fait son nid, des violettes à profusion, le printemps est là.
La nature a ce pouvoir magique de nous faire aimer la vie !
RépondreSupprimerQue voilà des petits plaisirs qui sont aussi des grands bonheurs... L'amitié des oiseaux me fait penser à mon livre préféré quand j'étais petite, très petite "La maison qui chante" .........................
RépondreSupprimerc'est une enchantement de te lire car ta façon de décrire la nature me la fait vivre par tous les sens
RépondreSupprimerC'est très joli, et l'expression "bouffée de bonheur" est parfaite. Un instantané de plénitude éphémère en quelque sorte... ;-)
RépondreSupprimerMerci à vous Marité pour ce petit partage enchanté.
RépondreSupprimerMerci pour vos commentaires ! :-)
RépondreSupprimerJ'arrive trop tard, mais c'est normal : je regardais les écureuils venir dérober les glands sous le grand chêne... ;-)
RépondreSupprimer•.¸¸.•*`*•.¸¸☆