samedi 18 novembre 2017

Marité - Forêt automnale

Fille de l'automne.

J'aime dire que je suis une fille de l'automne. C'est en son premier jour que j'ai poussé mon premier cri à l'aube d'un jeudi de septembre. J'aime cette saison parce qu'elle me va bien. Ses après midi de soleil m'enchantent. Je ne résiste pas au plaisir de rejoindre les Saulières, un massif boisé que je parcours sans me lasser tellement j'y trouve harmonie et sérénité, particulièrement en cette période de l'année.

J'emprunte le chemin conduisant à l'orée de la forêt et, comme d'habitude, je m'assois dans le creux de la vieille souche posée là depuis des décennies et qui semble m'attendre. Elle a gardé la tiédeur des quelques rayons de soleil tombant en escarbilles à travers les frondaisons. La luminosité ambiante, tamisée, apaisée a pris la place de celle d'été, trop vive, trop crue, trop mordante à mon goût. Une douce torpeur m'envahit et je laisse errer mon regard admiratif sur cette nature luxuriante qui m'entoure. Il est splendide, mon Limousin sous cette lumière cuivrée, chaleureuse et mon cœur se serre de bonheur.

Que de beautés, de senteurs nouvelles en cet automne arrivant sur la pointe de ses couleurs ! Cette saison sage libère crescendo sa puissance par petites touches, parant le monde végétal de nuances chaudes, lui donnant un éclat incomparable. Les sous bois exhalent des parfums prégnants d'humus. Ils se taisent. Parfois, le pépiement bref d'un oiseau trouble le silence. Ou bien, un écureuil, tout empanaché de roux s'élance telle une flamme vive dans le bosquet. On pourrait croire que nous sommes tous les trois les seuls habitants de la forêt.

Les Saulières s'abandonnent. Une ultime étincelle et un feu d'artifice incandescent les inonde de ses ors. Les Saulières brûlent. L' automne, dans sa magnificence a allumé un incendie d'une surprenante beauté. Le soleil, encore vigoureux, tisonne et la campagne s'embrase. La colline boisée brasille. Frênes, châtaigniers et chênes rougeoient, offrant à la vue un contraste inattendu avec le bleu-gris des pans du site ardoisier de Travassac. Mais cependant, pas de heurt : les couleurs se fondent miraculeusement. Le vert intense de quelques sapins sublime ces teintes chatoyantes.

Les fougères fauves grésillent et les bruyères pourpres flambent. Les ronciers s'habillent de rouge profond et de jaune ardent. Une grappe de mûres s'en échappe et au prix de quelques griffures légères, je les cueille en me tachant les doigts.

Je reste là de longs moments à me gorger de cette splendeur. Quand le soleil décline, je quitte à regret ma vieille souche, un brin nostalgique.

Bientôt, un vent sournois fera frémir les futaies, arrachant une à une les feuilles mordorées qui tomberont comme de l'or qui ruisselle, rejoignant la jonchée déjà brune et putrescente. Les arbres nus et tristes s'offriront malgré eux aux affres de la saison des frimas. Les animaux se terreront et les oiseaux se tairont.

Bientôt, du fond de la vallée monteront de minces filets de brume. L'automne tirera alors sa révérence en apothéose, sachant sa petite mort nécessaire à la vie future. Ses brûlures réchaufferont dans mon souvenir les froides et grises journées de l'hiver à venir.

13 commentaires:

  1. Moi qui suis une fille d’avril (une fille difficile) , des premiers balbutiements des perce-neige et du réveil de la nature, je suis en admiration devant toi, fille de l'automne, et de la façon dont tu décris cet embrasement.
    Merci pour ce beau texte, Marité.
    ¸¸.•*¨*• ☆

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  2. Je préfère l'automne et l'hiver à l'été qui ne me convient plus, le printemps a encore mes faveurs, je suis comme certains manteaux : demi saison ! ];-D
    Un joli texte MADAME !

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  3. magnifique texte qui effectivement ranime en moi les flamboiements des belles couleurs forestières de bien avant ma naissance de fin novembre où les arbres à ce moment là en général ont perdu leurs beaux atours

    tu peux imaginer du coup ma déconvenue lorsque je tente de décrire à mon mari daltonien les prodiges de ces couleurs d'automne :)

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    1. Merci Tisseuse ! Je plains surtout ton mari... ;-)

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  4. Marité, je suis aussi une fille du premier jour de l'automne o;) mais à la nuit tombée... J'aime les couleurs de l'automne à ses débuts, de fin septembre à octobre, même si en novembre, c'est parfois encore très beau. Là, maintenant, cela devient un peu tristounet, surtout quand il fait gris. Brume et brouillard, tu l'as bien vu. Fraternellement o;)

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    1. Nous sommes jumelles alors ! :-) Pivoine, nous avons un temps exceptionnel ici ces jours ci. J'ai sacrifié mon après midi pour lire et commenter les textes mais vraiment, ça me démangeait...

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  5. ... puis le printemps ramènera la forêt à la vie... les feuilles reverdiront, les hôtes de la forêt donneront naissance à leurs descendants... c'est ça, le miracle des saisons !!!

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  6. Vous donnez envie d'automne en Limousin!

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  7. Merci pour cette promenade automnale, champêtre et toute en poésie. Le rouge, l'or et les ocres te vont bien

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  8. Des mots bien choisis pour cette douce torpeur automnale, et ces airs brumeux qui se refroidissent lentement.

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  9. Joli tableau champêtre; on y est.

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  10. Arpenteur d'étoiles19 novembre 2017 à 16:46

    très beau texte Marité et une photo superbe
    les Saulières en rouge et or et un embrasement automnale !!

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  11. Merci tous pour vos coms.
    Je me suis régalée à lire tous vos textes : l'automne nous a inspirés je crois.

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