NE PENSER A RIEN…FACILE !
Cher oncle Gaston,
Vous me dites que vous préparez un ouvrage philosophique sur « La pensée existe-t-elle ?». Je m’incline avec respect devant une telle entreprise et suis convaincue que vous la mènerez à bien, comme vos ouvrages précédents. Votre livre « L’art de la pensée » avait soulevé des doutes, des divergences de vues, des discussions qui menèrent aux tribunes les plus prestigieux orateurs. Celui-ci, j’en suis certaine, déchaînera lui aussi la passion non seulement des intellectuels, mais aussi de la masse.
Vous me faites l’honneur de me demander mon avis et me priez de répondre à la question : « Comment ne penser à rien ? ». Puisque cela peut vous être utile, cher oncle Gaston, je vous réponds en toute simplicité.
C’est facile. Moi, du réveil au coucher, je ne pense à rien. Jamais. Penser m’ennuie. Penser, dans le sens où vous l’envisagez, bien sûr. Réfléchir, étudier, analyse, hésiter, biffer, recommencer, comparer, déduire, conclure. Serai-je tout à fait sincère ? Oui, par affection pour vous.
En vérité, penser m’ennuie. Penser est stérile, déformant. Surtout penser « à quelque chose ». Penser c’est réfléchir et réfléchir risquerait de m’entraîner loin, bien au-delà de ce que je souhaite : vers des responsabilités, des devoirs, des obligations, des contraintes morales.
Ne penser à rien va tout seul. Il suffit de se laisser conduire. Par ses désirs, ses envies, ses passades, ses impressions. Aucun effort, aucune discipline, seulement suivre le mouvement, la foule, la rumeur, les autres. Etre emporté par son instinct qui, c’est avéré, ne se trompe jamais. S’en remettre à lui, quel repos, quelle ivresse !
Mais je l’avoue, votre question me préoccupe. « Comment ne penser à rien ? » demandez-vous. Est-ce donc pour vous une telle difficulté ? Il m’a pourtant semblé rencontrer quantités de gens qui ne pensent à rien (la majorité, devrais-je dire) et ne s’en portent pas plus mal.
Vous savez comme je vous respecte, cher oncle Gaston. Mais je dois bien constater que vous manquez d’expérience. « Comment ne penser à rien » aurait dû, en effet, couler de source ; c’est tellement inné, naturel, qu’ en vous observant vous-même, vous auriez compris. Mais non, vous êtes contraint de vous adresser à des tiers, moi en l’occurrence, votre nièce dévouée. Alors, avec toute l’affection que je vous porte je soutiens votre oeuvre : utilisez mon témoignage sans hésitation, je vous suis toute dévouée et je signe
Lorraine
P .S : Peut-être pourriez-vous ajouter sous votre signature « En collaboration avec ma très chère nièce »…
Où lire Lorraine
Ou bien l'oncle Gaston en reste bouche bée, ou bien il rajoute un chapitre très philosophique à son livre "partage avec ma nièce" à son épais volume...
RépondreSupprimerL'idée d'un livre "Partage avec ma nièce" pourrait bien le turlupiner, en effet, ABC! Je vais le lui suggérer...
SupprimerTout l'art de ne pas répondre aux questions tout en y répondant... bien joué
RépondreSupprimerNoyer le poisson, une façon efficace de se sortir parfois de situations embarrassantes!
SupprimerSucculent !
RépondreSupprimerSur le même ton je demanderais bien la réponse de l'oncle Gaston...
Je crois que l'oncle Gaston réfléchit...(autre façon de penser!)...
Supprimertrop fort!
RépondreSupprimerMerci, Laura!
Supprimerj'adore !
RépondreSupprimerce pourrait être le début d'une longue correspondance :)
...mais cela exigerait de penser un peu...et pour la nièce, ce serait un solide effort!
SupprimerL'oncle sans doute en sera dubitatif et le doute est pensée je crois....
RépondreSupprimerPensons à planter des pensées - c'est la saison : au printemps nous aurons des idées à défaut de pensées.
L'oncle, dubitatif, est néanmoins rompu à la pensée, je crois...Mais la nièce ira jardiner tambour battant et mettra les pensées en terre...
SupprimerLe témoignage de la nièce est imparable et l'oncle Gaston ferait bien de s'en souvenir : comment ne penser à rien tout en pensant à tout, sauf ce à quoi l'on doit penser en connaissance du rien. Et c'est vous qui détenez le secret car il est bien de vous, ce défit de la semaine. Bravo Lorraine.
RépondreSupprimerTout de même... une belle claque pour le « cher oncle Gaston » ! Y a de quoi réfléchir ! ;o)
RépondreSupprimerJ'adore le post scriptum ! ... mais j'ai aussi apprécié ce qui précédait!
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