mercredi 14 octobre 2015

Gene M - Les premiers mots d'un livre (la suite)


Le début est là

- Que vas-tu faire ? demanda Nathalie

- Je vais aller là-bas, suivre le même chemin que mon père . A Athènes , je prendrai le bateau jusqu'à Alexandrie.

- Mais tu ne risques rien en retournant en Grèce ?

- Non, il me suffit de taire mes opinions de gauche, de faire profil bas et ça ira. De toutes façons, je ne resterai pas en Grèce.

Ils restèrent muets quelques instants, chacun muré dans ses pensées.

Vassili reprit :

- C'est étrange, j'ai réalisé que je ne savais presque rien de mon père, en dehors de sa jeunesse dorée à Alexandrie. Ces dernières années, il en parlait sans cesse.

- A quel moment est-il arrivé en Grèce ?

- après le conflit mondial, il y a eu la guerre civile opposant royalistes et communistes. Mon père s'était engagé aux côtés des royalistes. Il a rencontré ma mère qui n'avait pas 18 ans et je suis né. De cette période de sa vie je ne sais rien.

Nathalie eut une pensée pour son père. Lui non plus ne parlait pas de ses années de guerre. Nathalie savait seulement qu'il avait été prisonnier en Allemagne.

- Tu sais Vassili, je pense que l'on ne sait jamais grand chose de ses parents.

- Que s'est-il passé après la guerre civile ? Qu'a fait ton père ?

- D'après ma mère, il s'est passé quelque chose de grave. Du jour au lendemain, mon père a abandonné toute ambition politique, tout intérêt pour le pays. Il a même pensé repartir en Egypte. Mais sa famille qui n'avait pas apprécié son mariage avec une jeune fille pauvre lui a fait comprendre qu'il n'était plus le bienvenu. Plus tard les choses ont évolué et j'ai connu ma famille paternelle.
Il est resté en Grèce, a trouvé un poste de prof de maths et n'a plus jamais parlé de rien.

- Sa disparition n'a sûrement rien à voir avec ce qui s'est passé il y a 25 ans ! Tout cela n'a aucun sens. Et si je t'accompagnais en Egypte ?

- Mais ... pourquoi ?

Décidément, il ne comprenait rien.

- Je pense que ce serait plus facile à deux !

- Ecoute, dit Vassili froidement, je dois te laisser. Bonsoir !

Cette nuit là, Nathalie ne parvint pas à s'endormir. Pourquoi s'acharnait-elle à aimer un garçon qui n'éprouvait rien pour elle. Elle ne représentait pour lui qu'une paire d'oreilles compatissante.

Mais ce qu'elle entrevoyait à travers Vassili lui donnait une folle envie de vivre. Elle avait envie de tout larguer, de changer de vie, de reprendre ses études, de voyager, de vivre intensément. Même s'il ne se passait rien avec Vassili, cette histoire aurait au moins eu le mérite de la réveiller.
En attendant sa décision était prise, elle irait en Egypte.

Le lendemain, Nathalie découvrit une lettre de Vassili dans sa boîte à lettres. Elle était sûre qu'il mettait un terme à leur relation amicale. Les mains tremblantes , elle décacheta la lettre.

Bonjour Nathalie,

Pardon pour hier. Je prends l'avion demain pour la Grèce. Ma tante Marika, la jeune soeur de mon père, qui vit en Iran, doit passer quelques jours à Athènes. Il faut absolument que je lui parle de mon père. Si tu veux venir en Egypte, viens je t'attendrai à Alexandrie chez mes cousins. Téléphone moi, je viendra te chercher à l'aéroport du Caire.
Tu comptes beaucoup pour moi Nathalie.
Je t'embrasse
Vassili

PS : J'ai un petit cadeau pour toi . Va à la librairie en face de chez toi.
Tu demanderas le Quatuor d'Alexandrie de Lawrence Durrell de ma part.
Cela t'aidera à comprendre ce qu'était cette ville.

2 commentaires:

  1. une paire d'oreilles compatissante c'est déjà beaucoup... et pourquoi pas plus un jour si affinités?

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  2. Une belle histoire d'amour en perspective...

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