samedi 14 février 2015

Fred Mili - Si on m'avait dit


Si on m'avait dit que la tache qui se dessinait au plafond n'était pas due à l'humidité, j'aurais pâli.
Pourtant curieuse je grimpai sur l'escabeau. Passant mon doigt sur la peinture la texture me surprit : grasse, visqueuse.
J'étais interrogative. La couleur ne ressemblait à rien. Incrédule je frôlais de nouveau la peinture la portant à mes lèvres.
Je restais le doigt en suspens, figée. Le goût était reconnaissable entre mille.  
Soudain je tremblai en haut de l'échelle, les quatre pieds tour à tour se décollaient du sol, j'eus beau me cramponner la peur me ravageait. Descendre les trois marches fut un calvaire. Mon corps ne m'obéissait pas. Mes mains moites avaient du mal à se cramponner aux barreaux. La sueur dégoulinait de mon front traçant des sillons sur mon fond de teint.
Je serrais les fesses d'un coup, la peur se logeant toujours là où on ne l'attendait pas. Mon ventre convulsait.
Les pieds enfin posés sur le parquet je marchai dans tous les sens, d'un pas saccadé, les deux mains collées sur mes tempes comme si je voulais empêcher mon cerveau de s'échapper.
La trouille, la pétoche, la frayeur me saisit. Incapable de réfléchir, d'ordonner mes idées, je passai de la position assise à la position verticale. Mes mouvements désordonnés m'effrayaient. Je n'avais plus aucun contrôle sur moi.
Incrédule, je regardais la tache s'étendre sur le plafond puis mes mains. Je penchais la tête puis la levais en rythmes saccadés.
Soudain mon estomac se révulsa, machinalement je courus aux toilettes, cognant violemment la porte contre le mur, vomissant maladroitement. Hormis ces éructations, une cataracte de larmes s'écoula subitement mouillant mon tee-shirt déjà souillé.
Je m'assis, bloquant la porte, la tête dans les mains, reniflant péniblement. Qu'avais-je fait ?
Je me souvenais juste que Paul-Henri mon voisin du dessus et ami avait glissé ses mains sous ma jupe, arraché mon string puis m'avait plaquée contre le mur.
J'avais hurlé. L'instinct de conservation avait décuplé mes forces, je l'avais repoussé violemment puis attrapé le cendrier en onyx sur la table et frappé sans réfléchir.
J'avais couru dans son immense couloir, m'étais énervée contre la porte qui me résistait, j'avais descendu l'étage quatre à quatre sans attendre l'ascenseur, cognais contre la porte de chez moi avant d'enfoncer la clé dans la serrure.
Essoufflée, énervée, contrariée je me jetais sur le sofa puis m'endormis.
L'avais-je tué ? 


Où lire Fred Mili

5 commentaires:

  1. Pour les taches de sang au plafond, il n'existe pas de peine-plancher... tu peux toujours espérer une sanction au ras des pâquerettes :)

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  2. légitime défense ? pas toujours facile à plaider... Mais dans quelle galère t'es-tu mise... Pourquoi t'es-tu trompée d'étage ?
    avec le sourire

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  3. L'Arpenteur d'étoiles14 février 2015 à 09:23

    sacrée histoire (bien racontée), et très mauvaise surprise ; faut toujours se méfier des cendriers en onyx et de ceux qui en ont dans leur salon
    la suite risque d'être palpitante ...

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  4. un bon début de polar, sans aucun doute !
    envie de connaître la suite des événements....

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  5. Mini polar, palpitant comme un grand

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