Entre deux océans.
Elle l'avait rencontré au "Royal
Lieu" un guinche sur le boulevard des Italiens, à côté de
l'immeuble du journal Le Monde, assise sur une banquette de moleskine
rouge, il s'était incliné afin de l'inviter à danser, elle s'était
levée...
Elle s'appelle Nina, grande, brune aux
yeux verts, lui s'appelle Claude, brun, une belle jactance, la
chanteuse sur la petite scène qui leur roucoule "non ho l'età",
tout juste s'il ne lui murmure pas "t'as d'beaux yeux tu sais",
il la serre un peu, et c'est la gamelle du siècle, pas un car-wash,
non, tout dans le langoureux, le suave, il sait y faire le garenne,
le Royal Lieu c'est son terrain de chasse, la cousette accro aux
romans photos de Nous Deux, la charcutière du lundi qui vient se
faire reluire pendant que son pépère récupère de la fatigue de la
semaine.
Ils ont dansé un moment, enfin quand
je dis danser c'était plutôt la danse du ventre à ventre, ils sont
sortis, puis il l'a emmené prendre une glace au café de la Paix, en
terrasse, la foule du mois de juin, les touristes mitraillant le
Palais Garnier, allant chercher l'ombre de Coco Chanel rue Cambon,
juste en face, des amoureux enlacés passent devant eux, clin d'œil
complice.
Au volant de sa "Dauphine" il
l'a raccompagné chez elle, rue Rambuteau, un dernier baiser, puis un
p'tit rencard pour le lendemain... Demain c'est Dimanche ! Alors oui
a t-elle répondu avec des étoiles dans les yeux.
Ils sont partis : "je t'offre une
croisière sur une île" lui a t-il promis, elle s'est blottie
contre son bras, et s'est laissée bercer par le ronron du vaillant
petit quatre cylindres.
Au pont de Chatou il a pris une petite
route, puis s'est arrêté et a garé sa voiture sous un grand
platane. Il est tout bizarre Claude, cette fille le fascine, elle est
si belle dans sa jolie robe blanche juponnée qui se balance
gentiment au rythme de ses pas quand elle marche, il ne comprend pas
trop ce qui lui arrive, lui qui habituellement a hâte de "conclure",
est tout intimidé, et déjà il craint de la perdre.
Les voici sur l'île des
impressionnistes, un lieu à l'abri du temps, Chronos lui même n'y
plante pas ses griffes. Un joli restaurant "La maison Fournaise"
Maupassant en personne avait écrit un poème sur le mur, depuis afin
de préserver ce joli témoignage du passé, on repeint autour, mais
jamais on ne recouvre ce témoignage d'un temps révolu. Si vous
aimez l'endroit vous entendrez encore les flonflons des guinguettes
d'antan, les odeurs de peinture de Caillebotte, Renoir, ou autre qui
venaient là brosser leurs toiles.
Une jolie terrasse ombragée, le rosé
frais a mis le rouge aux joues de Nina, après les cafés Claude a
loué un canot pour une balade sur la Seine, c'est un canot à
l'ancienne, en acajou verni comme il se doit, ils ont fait le tour de
l'île, certes ça n'a pas été d'un océan à l'autre, mais plutôt
une romance entre deux rives.
(Daguerréotypes : Andiamo)
Y 's'rait'y pas tombé amoureux l'Claude ?
RépondreSupprimerMaryline : a bien y réfléchir ça lui ressemble beaucoup ! ];-D
SupprimerBelle romance entre deux rives ; y'a pas de plus beau lieu que celui où surgit le tic tac boum des coeurs ! Merci aussi pour Maupassant ; du coup je viens de relire son mur ... si beau aussi !
RépondreSupprimerAnnick : En Cet endroit je me suis rendu plusieurs fois, et ce fut toujours avec bonheur ! ];-D
SupprimerSous le platane l’ombre géante
SupprimerUn vélo posé contre un piquet attend comme moi
Je la vois qui arrive au loin
Elle porte sa veste lilas et le parfum de nos soupirs ….
Comme c'est joli, un platane sur lequel, comme chez Temporel, figurent deux cœurs gravés au couteau... ];-D
Supprimerjolie bleuette :)
RépondreSupprimerTisseuse : un coup c'est Hyde qui est au clavier, une autre fois c'est Jekill ! ];-D
SupprimerQue c'est joli... Et ce mur existe vraiment? incroyable ;-)
RépondreSupprimerMapie : Dans mon village qui s'appelle Paris, il existe encore des endroits oubliés du temps.
SupprimerLe mur existe bien sûr, la preuve cette photo prise par mes soins, le poème est de la main de Maupassant. Il règne en cet endroit, le parfum de Mimi Pinson et le musc des pensionnaires de la maison Tellier... UN monde, une époque, poussières d'antan. ];-D
Dommage qu'elle ait les yeux verts...pour un peu, j'aurais pu m'y croire...
RépondreSupprimerUne bluette ? Une verdette plutôt, du coup...
Mais tout compte fait j'aime Jekyll bien plus que Hyde ! ;-)
¸¸.•*¨*• ☆
Célestine : Allons tu me connais ? Je ne voulais pas que l'on te reconnaisse. Dans une autre vie je t'y emmènerai. ];-D
SupprimerAvec plaisir ! ;-)
Supprimerj'ai aimé te lire Andiamo
RépondreSupprimerun sens du récit
oui
et une chute renversante
dans un village nommé Paris...
un canot d'acajou verni joli
alors
j'y vais de mon couplet aussi
pas que les dames
mais ce sera le dernier
car après mes tits com's seront bien plus laconiques, sans doute
Impression
Canotier, ainsi flottant et naviguant, il peindra sur l’abyme. Et mille nénuphars se déploieront sur son esprit :
« … Peintre parmi l’impression, le bleu, l’or et le blanc ; la tache dans la matière ; rêveur en Marne ou Seine - mises en scène -, se voilant et ne touchant point la berge du savoir, mais colorant de verdure, huilant aux auvents jaunes vifs, et endimanchant à la hauteur du rêve une barque immense…
Au tableau du midi s’étalant, endormi, reposant aux matures le voilier des sillages. Alors, sans doute, les barques immobiles, traçant sous le soleil à la lumière des diaphanes, embrumant des visions précises sous le repos de l’astre…
Au Dimanche déramant, déclamant aux avirons des guinguettes sa passion aux dentelles des femmes, dans l’ombre des voilettes… »
:)
Cavalier : Comme c'est bien troussé ! Je le vois ce Maupassant, moustache d'ébène au poil luisant, jurant, riant, troussant, mais avec l'élégance d'un poète charmant. ];-D
SupprimerBen alors ? V'la ti pas que le tombeurs de ces dames se met à tomber amoureux. Très joli. L'histoire m'a bien emportée avec elle.
RépondreSupprimerTomtom : Et oui tel et pris qui croyait prendre. ];-D
SupprimerJ'aime beaucoup ce road movie; c'est bien écrit, on suit, on est voyeurs de ce couple en rodage... :)
RépondreSupprimerPascal Dupont : un couple en rodage... Belle expression ! ];-D
SupprimerC'est léger comme un amour qui nait!
RépondreSupprimerCa donne envie de s'offrir un petit tour d'île en amoureux.
Marie Kléber : L'embarquement pour Cythère ? J'ai une trière à quai qui attend ! ];-D
SupprimerUn souffle de nostalgie heureuse agréable à lire.
RépondreSupprimerLira : Et ça fait du bien au milieu de toutes les "joyeusetés" actuelles ! ];-D
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